Blackwater : des familles irakiennes portent plainte aux Etats-Unis

Vendredi 12 octobre 2007 — Dernier ajout jeudi 11 octobre 2007

11/10/2007 18:38

WASHINGTON (AFP) - Blackwater : des familles irakiennes portent plainte aux Etats-Unis

Un survivant et des familles de victimes irakiennes de la fusillade impliquant Blackwater en septembre à Bagdad ont porté plainte jeudi à Washington contre la société de sécurité, réclamant des explications et des dédommagements.

La plainte a été déposée devant le tribunal fédéral de Washington par plusieurs avocats réunis par le Centre pour les droits constitutionnels (CCR), une association de défense des droits de l’Homme.

Quatre enquêtes ont été ouvertes après la fusillade meurtrière dans laquelle des agents de Blackwater qui escortaient un convoi diplomatique sont soupçonnés d’avoir ouvert le feu sans raison et sans retenue. Un premier bilan évoquait 10 morts, mais un récent rapport irakien fait état de 17 morts et 22 blessés.

Le FBI (police fédérale) a pris la direction de l’une des enquêtes, une démarche qui laisse envisager des poursuites pénales aux Etats-Unis, même si le statut juridique de la société et de ses employés en Irak reste encore flou.

Les sous-traitants de la coalition internationale en Irak ne peuvent être poursuivis devant la justice irakienne, et la loi américaine qui permet de les traduire devant un tribunal fédéral ne concerne que ceux qui opèrent sous l’égide du ministère de la Défense, pas forcément ceux qui, comme Blackwater, travaillent pour département d’Etat.

La plainte des familles s’appuie sur une loi de 1789 sur la responsabilité civile envers les étrangers (Alien Tort Claims Act) qui permet aux tribunaux fédéraux de juger « toute action civile engagée par un étranger pour un dommage commis en violation de la loi des nations ou d’un traité des Etats-Unis ».

Blackwater — poursuivie au côté de ses filiales et de son PDG, Erik Prince — « a créé et entretenu une culture de non-droit parmi ses employés, les encourageant à agir en fonction des intérêts financiers de l’entreprise au prix de vies humaines innocentes », dénonce la plainte.

Intervenant la semaine dernière devant une commission parlementaire, M. Prince avait défendu ses agents, assurant qu’ils agissaient toujours de manière appropriée, et rappelant que si une trentaine d’entre eux étaient morts en Irak, personne placé sous leur protection n’avait été tué.

"Blackwater était et est prêt à tuer des passants innocents pour maintenir ce bilan de +zéro mort+ comme argument commercial", répond jeudi la plainte. Selon un rapport du Congrès, Blackwater a été impliqué dans près de 200 fusillades en Irak depuis 2005, et a tiré le premier dans plus de 80% des cas.

Les plaignants « méritent de savoir la vérité sur ce qui s’est passé (le jour de la fusillade), et ils méritent que justice leur soit rendue », a expliqué Shereef Akeel, un avocat de Detroit (nord).

En 2004, M. Akeel avait déjà été à l’origine d’une plainte déposée par d’anciens détenus de la prison irakienne d’Abou Ghraïb contre deux sociétés privées, Titan et CACI International, dont les interprètes et des interrogateurs privés sont soupçonnés d’avoir torturé des détenus.

Dans cette affaire, un juge fédéral a estimé que la loi de 1789 s’appliquait, mais il doit encore déterminer si les deux sociétés peuvent être poursuivies alors que leurs agents agissaient au service et sous le contrôle du gouvernement.

Selon l’association Human Rights Watch, la loi de 1789, longtemps inutilisée, a été invoquée quelques dizaines de fois depuis les années 1980, essentiellement contre des entreprises américaines soupçonnées de bénéficier financièrement de violations de droits de l’homme, en Birmanie ou au Nigeria par exemple.

© AFP

Publié avec l’aimable autorisation de l’Agence France Presse.

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