D’Accor à H&M, ces groupes occidentaux qui restent en Birmanie

Samedi 22 janvier 2022

Économie Birmanie

D’Accor à H&M, ces groupes occidentaux qui restent en Birmanie

Le secteur du tourisme, qui a noué des liens avec d’anciens partenaires de l’armée birmane, ne s’est pas désengagé. Les grandes marques d’habillement tergiversent, mettant en balance leur impact social.

Par Juliette Garnier et Clément Guillou Publié aujourd’hui à 08h52

Pour l’hôtelier Accor, le retrait de TotalEnergies de ses activités en Birmanie ne change rien : pas question de quitter un pays qui s’éveillait au tourisme international avant le coup d’Etat de février 2021, et où l’hôtelier français a établi une position privilégiée. Ni de mettre un terme à son partenariat avec le conglomérat local Max Myanmar, jadis proche du pouvoir militaire et soupçonné de complicité dans la persécution de la minorité musulmane rohingya.

« Le groupe est entré en Birmanie avec l’espoir d’apporter des changements positifs à la population. C’est dans cet esprit que nous maintenons notre présence », déclare Accor, qui souligne avoir soutenu financièrement et vacciné ses collaborateurs durant la pandémie de Covid-19.

Le groupe exploite neuf hôtels en Birmanie, par le biais de contrats de gestion avec des investisseurs locaux, lesquels emploient un millier de personnes. Dans les années 2010, il s’est implanté plus vite que ses rivaux américains dans cette destination alors en forte croissance.

Deux hôtels haut de gamme d’Accor, à Rangoun et Naypyidaw, soulèvent en particulier des questions. Leur propriétaire est l’homme d’affaires Zaw Zaw, l’un des plus puissants du pays à l’époque du partenariat, en 2013. Il a fait fortune grâce à ses relations avec le pouvoir militaire, s’octroyant concessions, licences d’importation et travaux publics. Des informations qu’Accor ne pouvait ignorer en 2013, Zaw Zaw et Max Myanmar étant largement cités dans les câbles diplomatiques américains révélés par WikiLeaks trois ans plus tôt, et faisant l’objet de sanctions du Trésor jusqu’en 2016.

Absence de sanctions

Ces soupçons lui ont valu l’échec d’une tentative de fusion avec un groupe singapourien, rejetée par le régulateur local en 2013, au moment même où Accor s’engageait avec lui. L’absence de sanctions visant aujourd’hui Zaw Zaw justifie le maintien du contrat, selon le groupe, à l’époque moins regardant sur le pedigree de son partenaire.

Outre ses relations passées avec l’armée, Max Myanmar est cité par la mission d’enquête du Conseil des droits de l’homme de l’ONU pour son rôle dans les persécutions visant les Rohingya. Les experts l’accusent d’avoir contribué financièrement au mur grillagé érigé à la frontière avec le Bangladesh.

De grandes chaînes hôtelières asiatiques comme Shangri-La et Okura exploitent des sites loués à l’armée birmane

Après l’élection d’Aung San Suu Kyi en 2016, Zaw Zaw s’était rapproché de la nouvelle dirigeante du pays, se rendant moins dépendant de l’armée. Selon le site d’information birman The Irrawaddy, il a, comme d’autres riches donateurs de la fondation de la Prix Nobel de la paix, été interrogé par la junte dans la foulée du coup d’Etat, en février 2021. Depuis, il se fait discret, sans toutefois être totalement tombé en disgrâce puisqu’il reste président de la Fédération birmane de football. Lire la suite.

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