L’OCDE présente un plan contre l’évasion fiscale des entreprises

Mardi 16 septembre 2014

L’OCDE présente un plan contre l’évasion fiscale des entreprises

Publié le 16 septembre 2014, à 14h28

par Gregory Blachier

PARIS (Reuters) - L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a présenté mardi une première série de mesures visant à harmoniser l’imposition des sociétés dans le monde et éviter ainsi que des multinationales échappent à l’impôt.

L’OCDE, qui mène ces travaux en coopération avec le G20, a formulé des recommandations qui, si elles sont mises en œuvre par les Etats, éviteront que des géants comme Google puissent transférer leurs bénéfices vers des paradis fiscaux.

L’organisation, qui a piloté avec un certain succès ces dernières années la lutte contre l’évasion et la fraude fiscales par les particuliers, s’attaque donc à un chantier d’ampleur.

L’Union européenne et les Etats-Unis estiment que l’évasion fiscale par les entreprises et les particuliers fait perdre aux Etats plusieurs centaines de milliards d’euros chaque année, par le biais de transferts vers des comptes off-shore notamment.

"Le G20 a déterminé que l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices faisaient peser une menace grave sur les recettes fiscales, sur la souveraineté et sur l’équité des systèmes fiscaux partout dans le monde", souligne Angel Gurria, secrétaire général de l’OCDE, dans un communiqué.

Il rappelle que les premières recommandations, qui portent sur la mise en cohérence de l’imposition des bénéfices, la prise en compte du pays d’activité dans l’imposition ou l’amélioration de la transparence, ont été approuvées par les pays du G20.

Ces mesures seront suivies d’une nouvelle vague d’ici fin 2015, date à laquelle l’OCDE aura dévoilé l’ensemble du plan d’action convenu l’année dernière avec les vingt premières puissances économiques mondiales, lorsque les médias et des élus se sont emparés du sujet.

C’est seulement à ce moment-là que les Etats devraient le traduire dans leur droit national.

NEUTRALISER LES TRANSFERTS INTRA-GROUPES

Amazon ou Google devraient alors être particulièrement touchés, d’autant que la croissance de l’économie numérique est une préoccupation majeure, mais beaucoup de secteurs - pharmacie ou biens de consommation - seront concernés.

Si les travaux de l’OCDE sur l’imposition des sociétés ont surtout visé depuis un demi-siècle à éviter que les entreprises soient doublement taxées sur les mêmes bénéfices, à travers un modèle de traité fiscal qui permet de répartir les bénéfices, les sociétés ont su exploiter toutes les failles.

Google, par exemple, peut transférer chaque année en toute légalité plus de huit milliards de dollars de profits d’Europe et d’Asie vers une filiale dont l’établissement fiscal est aux Bermudes, où il ne paie aucun impôt.

Les recommandations de l’OCDE conduiront à réviser le modèle de traité afin que les transactions transnationales soient exclues des dispositifs prévus par les traités fiscaux si le motif principal de la transaction est d’échapper à l’impôt.

Il s’agit, selon Pascal Saint-Amans, directeur du Centre de politique et d’administration fiscale de l’OCDE, de « mettre fin à la double non-imposition », qui s’est substituée dans certaines sociétés au risque de la double -imposition.

L’OCDE entend également résorber les failles dues aux échanges intragroupes, quand une filiale installée dans un paradis fiscal réalise tout ou partie d’une activité, comme les achats, pour l’ensemble du groupe.

PRÉSENCE NUMÉRIQUE SIGNIFICATIVE

A titre d’exemple, le groupe de téléphonie Vodafone a une centrale d’achats d’équipements au Luxembourg, où elle n’est pas imposée sur ses bénéfices. L’année dernière, cette filiale, qui compte 200 employés à peine, a généré plus de 400 millions d’euros de profits.

Il s’agira notamment de corriger les « prix de transfert », c’est-à-dire le prix auquel la filiale revend les biens ou services aux autres unités du groupe, pour les aligner sur les prix du marché, ou prix de libre concurrence, et les rendre conformes à la valeur créée.

L’OCDE entend en outre s’attaquer à la question de la résidence fiscale. Des groupes, dans le domaine du commerce électronique entre autres, peuvent avoir un entrepôt dans un pays pour y réaliser ventes et livraisons mais les règles actuelles ne les contraignent pas à y être établis fiscalement.

Une modification de ces règles aurait un impact fort sur Amazon, qui en profité pour enregistrer sur les comptes de sa filiale luxembourgeoise les quelque 15 milliards d’euros de bénéfices réalisés en Europe l’année dernière.

L’OCDE espère aussi faire valider le concept de « présence numérique significative » afin que les marchands de services en ligne tels qu’Apple ou eBay soient également contraints d’être établis fiscalement dans les pays d’activité.

(Avec Tom Bergin, édité par Yves Clarisse)

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