Monaco et justice controversée

Vendredi 16 octobre 2015

Monaco et justice controversée

vendredi, 16.10.2015

Rybolovlev-Bouvier. Le conflit renvoie au fonctionnement des institutions dans la principauté. Décision dans un mois.

Ian Hamel

[…] Dans un tout autre genre et d’autres circonstances, le genevois Yves Bouvier a été inculpé en février par la justice monégasque pour escroquerie et complicité de blanchiment. Accusateur : l’oligarque russe Dmitri Rybolovlev, qui l’avait chargé de lui constituer une collection d’œuvres d’art. Les deux affaires présentent des similitudes. Elles concernent d’abord deux milliardaires ayant longtemps vécu en Suisse. 146e fortune selon Forbes, Rybolovlev pèserait près de 9 milliards de dollars. Il n’a quitté Genève que récemment pour Monaco. Il vit dans l’appartement réputé le plus cher du monde. Celui qu’occupait Edmond Safra. Le conflit Rybolovlev-Bouvier mobilise un certain nombre d’avocats, et fait l’objet d’une guerre de communication. Avec une question plus ou moins implicite revenant toujours pour ajouter de la suspicion et de l’émotion : ce genre de cas n’est-il pas trop grand, trop lourd pour une minuscule principauté de 30.000 résidents, qui doit compter sur des magistrats français pour rendre la justice ?

Au début des années 2000, le député socialiste et futur ministre Arnaud Montebourg cultivait déjà l’une des phobies qui allait le rendre célèbre en Suisse : ne présentait-il pas Monaco dans un rapport parlementaire comme une machine à blanchir l’argent sale ? En cause : la faiblesse du système judiciaire. Venant d’Aurillac, dans le Cantal, muté trois ans sur le Rocher, le juge Charles Duchaine publiait en 2002 un témoignage au vitriol intitulé Juge à Monaco. Il racontait en particulier que sa hiérarchie n’avait cessé de lui mettre des bâtons dans les roues lorsqu’il tentait de s’attaquer à un circuit de recyclage de l’argent de la drogue. (A noter que c’est ce même Charles Duchaine, alors juge d’instruction à Marseille, qui a traité l’affaire du cercle de jeux Concorde, impliquant le banquier suisse François Rouge.)

On ne s’étonnera donc pas que les avocats et communicants mandatés par Yves Bouvier aient eux aussi mis en cause la justice monégasque. Le mensuel Vanity Fair a consacré un dossier d’une dizaine de pages intitulé « Le piège de l’oligarque ». Le palais de justice de Monaco se serait mis au service du milliardaire Dmitri Rybolovlev, par ailleurs président et principal sponsor du club de foot local, l’AS Monaco. Pour preuve ? Quelques jours avant l’inculpation d’Yves Bouvier, le Russe retrouvait Philippe Narmino à l’occasion d’un dîner mondain à Gstaad. Le chef de la Direction des services judiciaires monégasques, c’est-à-dire le ministre de la Justice de la principauté. Et Gérard Cohen, administrateur délégué de la filiale locale de HSBC.

Est-il ou non indifférent de constater aussi que HSBC est situé dans l’immeuble de Dmitri Rybolovlev à Monaco ? Cette filiale ne va-t-elle pas fournir au commandant de police de Monaco, le 17 février, des informations susceptibles d’accabler Yves Bouvier, qui s’avéreront erronées par la suite (lire plus bas) ? Lire la suite sur le site de l’Agefi suisse.

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