Paradis fiscaux (mai 2000)

Jeudi 14 juin 2007 — Dernier ajout vendredi 22 juillet 2011

Paradis fiscaux.

Le Monde diplomatique, Le marché de la loi rend les délinquants prospères, 04/2000 (Jean de MAILLARD) : « Une société mondiale qui prétend s’édifier sur les décombres des lois nationales, sans chercher à reconstituer, à un autre niveau, les normes sociales, transforme ainsi l’agora en vaste bazar où même les États se précipitent pour vendre à l’encan leurs réglementations.

[…] [Les] centres financiers offshore ont fait franchir une étape supplémentaire au mouvement de « désouverainisation » en utilisant précisément leur souveraineté comme un élément du commerce mondial le plus prospère : ils édictent en effet des législations dont la seule finalité est de permettre d’échapper, quel qu’en soit le mobile, aux normes légales des autres pays.

[…] On continue pourtant de s’interdire, au nom du principe sacré de la souveraineté nationale, toute influence sur les pays qui monnayent leur souveraineté et vendent leur législation aux plus offrants. Ceux qui, par de simples jeux d’écritures, ont la capacité d’exporter ou d’expatrier leur patrimoine ou leurs activités dans ces trous noirs de l’économie et de la finance mondiales n’agissent que grâce à la complicité de leurs propres États d’origine.

[…] La mondialisation […] s’est construite sur une déréglementation forcenée, et il faudrait, si l’on voulait en remonter le cours, s’aventurer dans la construction d’un ordre mondial dont la seule évocation donne le frisson.

[…] Il faudrait […] reconnaître que la communauté internationale a le droit d’imposer aux États gangsters, ainsi qu’à leurs complices publics et privés, les règles minimales d’un État de droit ». [Les réseaux qui, en France, brandissent l’étendard du "souverainisme" sont les mêmes qui, en Afrique, multiplient les circuits d’évasion financière et de gestion mercenaire, transitant par les « États gangsters ».

Dans le même numéro du Monde diplomatique, Christian de Brie expose brillamment (États, mafias et transnationales comme larrons en foire) les graves conséquences de ce laxisme.

Pourquoi faut-il qu’il gâche sa démonstration en amplifiant une calomnie lancée par Le Canard enchaîné : l’association anti-corruption Transparency International (TI) serait une « correspondante de la CIA », elle agirait « sous la houlette de la démocratie américaine, la plus corrompue de la planète » ?

Dans la course à la corruption, la démocratie française n’a malheureusement rien à envier à l’américaine. Elle a d’excellents entraîneurs, fort marris des campagnes de TI : les milieux mêlés du pétrole et de l’armement, infiltrés par les services secrets.

À lire les articles du Canard (cf. Billets n° 68 et 76), on s’aperçoit que les rumeurs contre TI émanent de ces milieux-là - les émules d’Alfred Sirven. Il est des sources plus fiables.

Profitons-en pour signaler, dans le même numéro, un article passionnant de Gérard Prunier (Recomposition de la nation somalienne). Ou comment se reconstitue une communauté politique dans un cas considéré comme désespéré.

Il suffit de ne plus négliger les fondations et de respecter l’« architecture » locale : « L’idée même d’un État en tant qu’autorité supraclanique est une catégorie fondamentalement étrangère à la culture somalie »].

Extrait de Billets d’Afrique et d’Ailleurs N°81 - Mai 2000 -

Billets d’Afrique et d’Ailleurs est la revue mensuelle éditée par Survie.

Publié avec l’aimable autorisation de l’Association Survie.

Visitez le site de Survie.

Revenir en haut