Pastis…

Mardi 7 août 2007

Pastis…

Une grande première. Les Etats-Unis ont accordé le droit d’asile à deux citoyens français, Ali Auguste Bourequat et Jacqueline Hémard, qui craignent pour leur vie dans l’Hexagone.

Le premier est un rescapé du mouroir de Tazmamart, où l’avait expédié Hassan II.

La seconde est mariée à l’un des héritiers du groupe familial Pernod-Ricard.

Tous deux ont fait des révélations stupéfiantes sur la french-moroccan connection, relayées par une série du San Francisco Chronicle.

Bref rappel. Au début des années 60, De Gaulle et Foccart avaient, pour combattre l’OAS, recruté des barbouzes de tous poils, y compris des truands. Certains d’entre eux installèrent au Maroc, avec la bénédiction du jeune monarque, une multinationale de stupéfiants.

Selon Ali Bourequat, « Pernod-Ricard servait de couverture aux services spéciaux français, pour le trafic de drogue comme pour le reste ». Autrement dit, une joint-venture reliait les "services" français - officiels (SDECE) et foccartiens (SAC) - Hassan II, la pègre et Ricard.

Or, tout cela n’est peut-être pas à conjuguer au passé. La déposition de Jacqueline H. a ébranlé les autorités US : « […] Mon mari, M. Eric Hémard […], était étroitement lié avec des membres influents du gouvernement français. […] La famille Hémard a contribué à mettre en place des installations de transformation de la cocaïne au Maroc. Le ministre de l’Intérieur, M. Pasqua, et le roi du Maroc, aussi bien que la famille de mon mari, étaient impliqués dans la mise en place de laboratoires. Cela démarra il y a de nombreuses années, vers 1962, avec le père de mon mari et d’autres individus. Cela se développa dans les années 70 et 80.

M. Pasqua travailla dix ans pour la famille Hémard, dans la branche exportation de leur entreprise nommée Pernod & Ricard, avec le roi du Maroc. C’est pour le compte de l’entreprise Pernod & Ricard qu’ils mirent en place les laboratoires de drogue. […] Mon mari […] m’expliqua que les 100 000 dollars que chacun des Hémard recevait chaque année de leur mère […] provenaient des revenus issus du trafic de drogue au Maroc. D’évidence, c’était devenu très lucratif.

M. Pasqua avait été auparavant ministre de l’Intérieur entre 1986 et 1988. Il redevint ministre entre 1993. […] Je crois que, si je retourne en France, je serai persécutée en raison des informations que je procède à propos d’individus, à l’intérieur du gouvernement français, qui sont profondément impliqués dans le trafic de drogue ».

Des noms ! C’est Maintenant, dans son ultime numéro (20/03/1996), qui fait ces révélations 1. Il enquêtait sur les recoins les plus sordides du pouvoir. Un travail de salubrité publique, qui rebute les grandes rédactions. On se ménage, comme dirait Gilles (ex-Elysée, débranché de l’EDF).

1. A signaler aussi un dossier sur les compromissions de la France et de Total avec la junte birmane. Principal investisseur en ce pays, la France légitimise ainsi une dictature « dont la responsabilité dans le trafic d’héroïne n’est plus à démontrer ». On n’en sort pas…

Extrait de Billets d’Afrique et d’Ailleurs N°33 - Avtil 1996 -

Billets d’Afrique et d’Ailleurs est la revue mensuelle éditée par Survie.

Publié avec l’aimable autorisation de l’Association Survie.

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