Un enquêteur suisse invoque le droit saoudien dans le dossier Juan Carlos
Un enquêteur suisse invoque le droit saoudien dans le dossier Juan Carlos
Le procureur genevois Yves Bertossa veut prouver que feu l’ex-roi d’Arabie saoudite a détourné des fonds publics, dans un dossier où trempe l’ancien roi d’Espagne. Un combat peut-être sans espoir.
Ce contenu a été publié le 25 août 2021 - 16:07 25 août 2021 - 16:07
La Suisse poursuit son enquête sur un potentiel blanchiment d’argent concernant des personnes liées à l’ancien souverain espagnol Juan Carlos. Une banque privée de Genève est aussi dans le collimateur.
Pour rappel, Juan Carlos aurait reçu en 2008 un cadeau de 100 millions de dollars soustraits du trésor public via l’entremise de feu le roi saoudien Abdallah. Des pots-de-vin en lien avec la construction d’un train à grande vitesse entre Médine et La Mecque. Juan Carlos aurait négocié un accord avec un consortium espagnol et obtenu une remise.
La somme s’est retrouvée sur le compte d’une fondation basée en Suisse, dont bénéficiait Juan Carlos. Le procureur du canton de Genève Yves Bertossa s’y est intéressé puisque l’argent a transité par la Suisse.
Investigations difficiles
Mais pour pouvoir inculper une personne de blanchiment d’argent en Suisse, l’infraction qui a été commise doit être prouvée à l’étranger.
Pour Frank Meyer, professeur de droit pénal international à l’université de Zurich, Yves Bertossa a du pain sur la planche. « Ces enquêtes figurent parmi celles qui sont les plus difficiles à mener », explique-t-il à SWI swissinfo.ch. Selon lui, la lutte contre le blanchiment d’argent s’est souvent avérée infructueuse en Europe. « L’acharnement d’Yves Bertossa est d’autant plus remarquable et louable », observe-t-il.
Dans le cas précis, la justice a au moins déjà connaissance de la provenance de l’argent. « En général, cette traçabilité fait défaut », précise-t-il. Mais la principale pierre d’achoppement est ailleurs.
Infraction punissable par le droit saoudien ?
Yves Bertossa doit prouver qu’en vertu du droit saoudien ces 100 millions sont parvenus illégalement au roi Juan Carlos. En bref : qu’un détournement de fonds publics ou une acception d’avantages ou toute autre forme de corruption est recevable, non seulement au regard de la législation pratiquée en Suisse, mais également en Arabie saoudite.
« Les autorités suisses doivent fonder leur évaluation sur le pays d’origine. Il serait inimaginable qu’en Suisse, un acteur de la fonction publique transfère des sommes à un monarque à l’étranger. Mais cet acte est peut-être légitime à Ryiad, même si c’est difficile à l’imaginer », selon l’expert.
Pour en avoir le cœur net, la Suisse aurait besoin d’une assistance juridique de l’Arabie saoudite. Frank Meyer est cependant circonspect. « Il ne faut guère s’attendre à des miracles côté saoudien, estime-t-il. Une telle demande n’aboutira probablement à rien. »
Un avis partagé par Mustafa Nasar, chercheur à l’université de Bâle et spécialiste des pays du Golfe. « La probabilité que Ryiad fournisse une telle assistance à la Suisse est faible », prévient-il. Au mieux, la Suisse peut s’attendre à une aide symbolique pour des questions d’image. Lire la suite.
paradisfj.info
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