Arrestations confirmées de trois banquiers

Vendredi 9 novembre 2007 — Dernier ajout samedi 3 juin 2017

ECONOMIE : Arrestations confirmées de trois banquiers

Date de parution : Vendredi 9 novembre 2007

Auteur : Yves Genier

CHANGES. Les gérants suisses au Brésil auraient facilité un système de compensation illégal.

Trois banques suisses, UBS, Clariden Leu et AIG Privatbank, ont confirmé jeudi l’arrestation de trois de leurs employés au Brésil. Les trois établissements ont indiqué « être en contact » avec les autorités de ce pays latino-américain dans le cadre de cette affaire. UBS précise qu’elle n’est pas elle-même mise en cause.

Un gérant de fortune de la grande banque, un gérant de Clariden Leu et une gérante d’AIG Privatbank ont été appréhendés mardi par la Police fédérale brésilienne dans le cadre d’une enquête sur une vaste affaire d’évasion de fonds émanant d’entrepreneurs brésiliens pour un total de plus de 600 millions de réis (près de 400 millions de francs). En tout, vingt personnes ont été arrêtées, à São Paulo et dans trois autres Etats brésiliens.

Les autorités brésiliennes reprochent notamment à ces personnes d’avoir fait sortir ces fonds du pays sans passer par les contrôles des changes assurés par la Banque centrale du Brésil en recourant aux services de cambistes clandestins. Appelés aussi « doleiros », ces derniers recourent à un système de compensation qui évite les transferts d’argent à travers les frontières brésiliennes afin d’échapper au regard des autorités, lit-on dans la Folha de São Paulo.

Echapper au fisc

Selon la National Money Transmitters Association américaine, le doleiro encaisse les montants de ses clients sur ses comptes au Brésil. Simultanément, il crédite la contre-valeur en réis ou en devises sur un ou des comptes à l’étranger au nom de son client. Il opère aussi dans l’autre sens, en encaissant des montants sur un compte dans un pays tiers et en créditant la contre-valeur sur un compte au Brésil au bénéfice de son donneur d’ordre étranger, ou du bénéficiaire du paiement de ce dernier. Ces opérations surviennent en général simultanément. Le doleiro doit s’assurer que les opérations se compensent afin d’éviter de se retrouver lui-même à court de liquidités. Il se rémunère par prélèvement de commission.

Ses services sont demandés avant tout par des personnes désireuses d’échapper au fisc, soit en dissimulant des fonds à l’étranger, soit en évitant que des apports de fonds au pays ne soient enregistrés par la banque centrale, laquelle peut communiquer l’information aux autorités fiscales. La méthode est aussi employée à des fins de sous-facturation de biens importés afin de minimiser les taxes douanières. Le solde du prix d’achat réel est réglé directement via des comptes à l’étranger. Cette pratique, couramment employée par les banques suisses il y a quelques décennies, est prohibée par la Convention de diligence depuis la fin des années 1970. Son risque principal est de faciliter le blanchiment d’argent. « Il est arrivé qu’un bénéficiaire de ce système soit inquiété par la justice car il a reçu de l’argent émanant d’activités illégales sans le savoir », observe un avocat spécialisé dans le droit bancaire.

Il n’est pas certain que les reproches adressés par les autorités brésiliennes aux trois banquiers suisses inquiétés s’appliquent aussi en droit helvétique. C’est notamment le cas pour les questions d’évasion fiscale. En revanche, s’il apparaît qu’il y a eu mise en place d’un système d’escroquerie fiscale et s’il est établi que les banquiers ont agi sur mandat de leur hiérarchie, les banques concernées peuvent se faire du souci. « En pratique, les mécanismes ne sont plus aussi simples. Les gens sont devenus beaucoup plus malins », conclut l’avocat.

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