Le livre Noir Canada est lancé malgré les menaces de Barrick Gold

Dimanche 18 mai 2008

Le livre Noir Canada est lancé malgré les menaces de Barrick Gold

Mardi 15 avril 2008

Dans le numéro du 26 mars, le journal Alternatives présentait en exclusivité des extraîts du livre Noir Canada sous la direction d’Alain Deneault, publié chez Écosociété. Dans ce même numéro, il y avait aussi un article sur les poursuites bâillons, ces poursuites intentées par de grandes entreprises contre des citoyens ou de petites organisations. Quelques semaines plus tard, voilà qu’Écosociété est menacée de poursuite par la multinationale Barrick Gold.

Presse Canadienne, le 14 avril 2008

OTTAWA — Les Editions Ecosociété ont décidé de distribuer comme prévu le livre « Noir Canada : pillage, corruption et criminalité en Afrique », en dépit des menaces de poursuite de la société aurifère Barrick Gold.

La maison montréalaise a pris cette décision lundi, après en avoir discuté avec les auteurs Alain Deneault et le Collectif Ressources d’Afrique. Le lancement aura lieu ce mardi à Montréal. Le livre devrait être disponible en Europe d’ici quelques semaines.

Pour le groupe, le moment est venu de tenir un débat « légitime et nécessaire » sur le comportement des entreprises canadiennes à l’extérieur du pays.

M. Deneault rappelle que plusieurs citoyens financent sans le savoir des abus, par l’entreprise de leurs placements ou de leurs régimes de retraite. « Les Canadiens ont le droit de savoir ce qu’il advient de leurs actifs », a-t-il insisté.

Le collectif et son éditeur refusent en outre de se laisser intimider par un géant minier qui dispose de ressources quasi-illimitées et n’hésite pas à déployer son arsenal pour défendre sa réputation.

« Pour nous, ce livre-là, c’est un test pour la démocratie canadienne et la liberté d’expression », a insisté l’auteur, qui est docteur en philosophie et auteur d’un autre ouvrage sur Paul Martin et les paradis fiscaux.

En entrevue à la Presse Canadienne, M. Deneault a souligné que l’ouvrage s’appuyait sur des sources crédibles, dont des experts mandatés par le Conseil de sécurité de l’ONU ainsi que plusieurs organisations non gouvernementales dont Human Rights Watch et Amnistie internationale.

Le chercheur, ses collègues du collectif ainsi que les membres du conseil d’administration d’Ecosociété ont tous reçu la semaine dernière une mise en demeure de Barrick Gold (TSX:ABX), qui promet de les traîner en cour s’ils distribuent ne serait-ce qu’une seule copie du livre.

Les avocats de Barrick n’ont pas pris connaissance de l’ouvrage de 350 pages, qui n’est pas encore disponible en librairie. Ils affirment néanmoins que toutes les allégations qu’il contient au sujet des activités de la société en Afrique sont « fausses et grandement diffamatoires ».

Ils préviennent que la société réclameront une injonction ainsi que des dommages et intérêts « substantiels » si elles sont rendues publiques.

Les avocats ont été mis au courant lundi après-midi de l’intention d’Ecosociété de distribuer « Noir Canada » dès cette semaine. Me William Brock, qui signe la mise en demeure, n’a pas rappelé pour commenter cette décision.

De l’avis du Collectif Ressources d’Afrique, la démarche de Barrick laisse présager un SLAPP, c’est-à-dire une poursuite visant à réduire au silence les participants à un débat public en les enterrant sous les poursuites et en les épuisant financièrement.

« Quand on voit que des gens sur un ton tout à fait intimidant, envoient une mise en demeure à propos d’un livre qui n’a pas été lu à un nombre extraordinaire de destinataires, on ne peut pas voir autre chose dans une telle méthode qu’une mesure d’intimidation », a fait valoir M. Deneault.

Le gouvernement du Québec a laissé savoir la semaine dernière qu’il entendait légiférer d’ici quelques mois pour empêcher ce genre de tactique, souvent dénoncé par les groupes communautaires et environnementaux.

Barrick Gold est la plus grosse société aurifère du monde. Elle exploite actuellement 27 mines d’or, d’argent et de cuivre, sur les cinq continents. L’entreprise est inscrite à la Bourse de Toronto, comme 60 pour cent des sociétés minières du monde.

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