Affaire Madoff/UBS : Image de la place financière de Luxembourg mise à l’épreuve

Mardi 13 janvier 2009

Affaire Madoff/UBS/Image de la place financière de Luxembourg mise à l’épreuve

Bruxelles (AWP/AFP) - La place financière de Luxembourg, déjà sous le feu des critiques de Paris et Berlin pour son secret bancaire, craint d’être éclaboussée par la chute du financier américain Bernard Madoff si son mécanisme de supervision était pris en défaut dans cette affaire.

Les autorités luxembourgeoises ont lancé une enquête début janvier pour remonter la chaîne des responsabilités des banques dépositaires, dont la suisse UBS, et des auditeurs de fonds d’investissement domiciliés au Luxembourg, qui ont placé des actifs dans des sociétés de Madoff aux Etats-Unis.

Il y va de la réputation du grand duché et les enjeux sont importants. Luxembourg, avec un montant d’actifs sous gestion de plus de 1600 milliards d’euros fin novembre 2008, est le second centre mondial des fonds d’investissement après les Etats-Unis et le premier en Europe avant la France.

Les engagements pour l’instant évalués à 1,9 milliard d’euros des clients des fonds luxembourgeois dans Madoff ne représentent certes que 0,15% de ces encours totaux de l’industrie grand-ducale de la gestion collective.

Mais le pays défend jalousement son secret bancaire ainsi que le sérieux et la qualité de sa place financière, de ses produits et de la supervision bancaire, et un scandale pourrait nuire à cette image de marque.

Cela serait d’autant plus fâcheux que le Luxembourg a été récemment engagé dans une polémique acerbe avec ses deux grands voisins, la France et l’Allemagne, qui semblaient ranger le grand duché parmi les opaques « paradis fiscaux » impliqués dans la crise financière mondiale.

« La place financière a évidemment à craindre pour sa réputation dans l’affaire Madoff », a reconnu devant la presse le directeur de l’Association des banques et banquiers Luxembourg, Jean-Jacques Rommes.

Il souhaite donc que les investigations de la Commission de surveillance du secteur financier (CSSF), chargée de la régulation de la place, aillent très vite et que « toutes les responsabilités soient clairement établies ».

La CSSF s’intéresse particulièrement au rôle qu’a joué la filiale locale d’UBS, UBS Luxembourg, banque dépositaire et gestionnaire de deux fonds d’investissement ouverts au public, Luxalpha et Luxinvest.

UBS a délégué la gestion des fonds à des intermédiaires, qui les ont ensuite placés auprès des sociétés de Bernard Madoff.

Les sociétés américaine, Access International Advisors, et luxembourgeoise Access Management Luxembourg, comptaient parmi ces intermédiaires, selon les rapports annuels de Luxalpha et Luxinvest consultés par l’AFP.

Les documents ne mentionnent pas en revanche le nom des sociétés de Bernard Madoff, qui ne disposaient pas en Europe de licences pour gérer l’argent des investisseurs du Vieux continent.

« La banque dépositaire, les firmes d’audit et tous les intermédiaires qui apparaissent dans les fonds étaient-ils de simples boîtes aux lettres qui ont permis à Bernard Madoff d’attirer l’argent des investisseurs européens ? », s’interroge un client de Luxinvest.

Le financier français, Thierry Magon de Villehuchet, qui s’est suicidé dans son appartement new-yorkais peu avant Noël, apparaît dans le conseil d’administration d’Access Management Luxembourg (AML). Il était aussi l’un des fondateurs et dirigeants d’Access International, la maison mère d’AML.

La CSSF a rappelé, sans citer le nom d’UBS, que la banque dépositaire est responsable des actifs des fonds même si elle les délègue à des tiers. Et que les fonds d’investissement de droit luxembourgeois ouverts au grand public relèvent des dispositions d’une directive de 1985, qui assure en principe aux investisseurs des garanties de protection identiques partout en Europe.

Pour l’instant, les fonds ont été suspendus en décembre par les autorités luxembourgeoises, ce qui permet de geler provisoirement les demandes de remboursement des milliers d’investisseurs européens concernés.

sm

(AWP/12 janvier 2009 08h55)

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