« Let’s make money » : le (dés)ordre économique mondial expliqué aux nuls dans un documentaire

Jeudi 16 avril 2009

« Let’s make money » : le (dés)ordre économique mondial expliqué aux nuls dans un documentaire

PARIS (AFP) — Paradis fiscaux, privatisation des équipements collectifs, spéculation effrénée, surexploitation de la main d’œuvre, pays africains ruinés par le protectionnisme occidental… « Let’s make money » met en lumière les méfaits du néolibéralisme triomphant, aujourd’hui en crise.

D’une actualité brûlante, ce documentaire à l’affiche mercredi est signé par l’Autrichien Erwin Wagenhofer.

Celui-ci a déjà réalisé "We feed the world« sur les ravages écologiques causés au niveau mondial, par la pêche et l’agriculture intensives. »Où va l’argent que VOUS déposez sur un compte bancaire ? Que font les banques lorsqu’elles disent le faire +travailler+ ?"

Wagenhofer répond à cette question simple mais fondamentale, au fil d’une passionnante enquête qui l’a mené partout : Ghana, Burkina Faso, Inde, Suisse, Espagne, Etats-Unis…

Elle conduit le spectateur à réfléchir à sa propre implication dans un système économique qui à l’échelle du globe, ne profite qu’à 2 ou 3% de riches.

« J’ai commencé à tourner ce film en 2006. Tous les experts sentaient la crise venir et malgré cela, on s’est précipités dedans, c’est effrayant ! » a dit le réalisateur lors d’un entretien à l’AFP.

« Notre épargne est gérée de façon totalement opaque, elle va dans des fonds spéculatifs qui sont des bureaux de paris. Pour jouer, on va à Las Vegas ! Quand les banques jouent, c’est la population qui trinque ».

« Le G20 vient de décider de remettre de l’argent dans le système, mais on n’a pas trouvé comment changer de voie », estime-t-il.

Si votre épargne, comme c’est probable, est en partie placée en bourse par votre banque, elle est gérée par des experts tels que Mark Mobius, dit le film.

Ce gourou des « marchés émergents » - autrefois nommés Tiers monde, pays du Sud ou en voie de développement - a pour seul but d’accroître les 50 milliards de dollars de son fonds spéculatif, Templeton.

Direction Chennai, ex-Madras en Inde où Mirko Kovats, riche homme d’affaires autrichien, devise au volant de sa voiture : « Ici, personne ne réclame l’aide de l’Etat, chacun se débrouille seul… ce qui compte, c’est l’économie ! »

En contrepoint le cinéaste filme une rivière noire, gorgée de polluants, et sa rive à l’odeur pestilentielle où s’entasse un tiers des 8 millions d’habitants de la ville. A qui profite ce désastreux « développement » ?

Pas à l’Etat indien : les cadeaux fiscaux aux multinationales le privent d’argent pour les infrastructures.

Ni aux ouvriers : déjà « très mal payés » concède M. Kovats, ils devront faire des heures supplémentaires non rémunérées sous la « pression de la mondialisation »… Pour faire travailler MON argent, se dit le spectateur.

Adopté par le Fonds monétaire international et la Banque mondiale dès les années 70, le « consensus de Washington » se résume à 4 mesures : déréguler les marchés financiers, libéraliser le commerce, affaiblir l’Etat en réduisant ses recettes fiscales et privatiser, résume un économiste.

Edifiant, « Let’s make money » en montre les conséquences : bulle immobilière en Espagne, évasion fiscale vers les paradis fiscaux, privatisation de services publics qui « dépouille la communauté », dit un député allemand.

Et au Burkina Faso, la monoculture du coton a érodé les sols et ne rapporte pas même pas de quoi manger, car Etats-Unis et Europe protègent leurs marchés.

Un responsable local avertit : « Si les Occidentaux n’arrêtent pas de subventionner leur coton, nous serons obligés d’abandonner. Alors, ils pourront construire des murs de dix mètres de haut, nous viendrons en Europe ».

Copyright © 2009 AFP.

Publié avec l’aimable autorisation de l’Agence France Presse.

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