Fraude fiscale en Allemagne : le secret bancaire suisse de plus en plus poreux

Lundi 1er février 2010

Fraude fiscale en Allemagne : le secret bancaire suisse de plus en plus poreux

La nouvelle affaire d’évasion fiscale qui s’annonce entre la Suisse et l’Allemagne vient s’ajouter à plusieurs scandales qui ont ébranlé la Confédération helvétique ces dernières mois, faisant apparaître un secret bancaire de plus en plus poreux.

AFP - le 31 janvier 2010, 17h48

Selon des informations parues dans le Frankfurter Allgemeine Zeitung samedi, un informateur a proposé au fisc allemand de lui vendre une liste de 1.500 contribuables ayant caché des fonds en Suisse.

L’informateur, qui demeure anonyme, réclamerait 2,5 millions d’euros contre un CD contenant les données bancaires des coupables d’évasion fiscale.

Tandis que l’Allemagne s’interrogeait dimanche sur la moralité d’un tel paiement, l’inquiétude grandissait en Suisse sur ces marchandages qui mettent à mal son secret bancaire.

D’autant que l’affaire allemande survient quelques jours à peine après l’annonce du règlement d’un dossier très similaire avec la France.

Paris avait obtenu des données volées par un employé d’une filiale de la banque britannique HSBC à Genève, lui permettant d’établir une liste de quelque 3.000 contribuables soupçonnés d’évasion fiscale dans la Confédération.

La perspective de voir la France utiliser ces informations issues d’un vol avait fait bondir Berne et jeter un froid entre les deux pays.

Une rencontre au plus haut niveau lors du Forum économique mondial (WEF) cette semaine a permis d’apaiser les tensions. Selon le ministre suisse des Finances, Hans-Rudolf Merz, Paris a promis de ne pas demander « d’assistance administrative sur la base de ces documents » et en a transféré une copie aux autorités suisses, comme Berne le réclamait.

L’affaire en Allemagne pose la même question de l’utilisation par le fisc d’informations d’origine illégales.

Sans confirmer les faits, la présidente de la Confédération Doris Leuthard a estimé « difficile qu’un Etat de droit utilise des données illégales ».

« Cela reviendrait à faire affaire avec des criminels, ce qui est contre la loi », a-t-elle asséné.

Interrogé samedi par la radio suisse romande, le secrétaire général de l’Association des banquiers privés suisses, Michel Dérobert a jugé « inquiétante » cette nouvelle affaire. "Les mauvaises idées sont contagieuses", a-t-il prévenu.

Le malaise est d’autant plus grand en Suisse que le sacro-saint secret bancaire, qui a fait la fortune de la Confédération, n’en finit pas de prendre des coups depuis un an.

Attaquée de toutes parts à la faveur de la crise économique, la Suisse a ainsi fini par accepter en mars d’y ouvrir une brèche en se conformant au standards de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) mettant fin à la distinction entre évasion fiscale et fraude.

Une autre affaire a largement contribué à fragiliser le secret bancaire en 2009 : celle d’UBS aux Etats-Unis où la banque est accusée d’avoir aidé des milliers de contribuables à ouvrir des comptes offshore pour échapper à leur fisc.

En février, le géant helvétique avait accepté de livrer les noms de 250 clients américains pour apaiser le fisc américain.

Puis en août, c’est Berne elle-même qui fait un pied-de-nez au droit helvétique garantissant le secret bancaire, pour mettre fin aux nouvelles poursuites contre la banque aux Etats-Unis. Cette fois, les autorités acceptent de donner 4.500 noms de clients au fisc.

La justice helvétique est venue rappeler le droit en janvier, dénonçant ces deux accords et obligeant Berne à renégocier avec Washington. Un bourbier de plus pour la Confédération qui sort déjà d’une année noire.

© AFP

Publié avec l’aimable autorisation de l’Agence France Presse.

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