Claude Dumont-Beghi, chasseuse de trusts dans les paradis fiscaux

Vendredi 4 novembre 2011

Claude Dumont-Beghi, chasseuse de trusts dans les paradis fiscaux

PARIS (AFP) - Avocate fiscaliste parisienne, Claude Dumont-Beghi s’est fait une spécialité : la traque des trusts dans les paradis fiscaux qui l’a propulsée au cœur des affaires Wildenstein et Pleyel.

« Je ne supporte ni l’injustice, ni les systèmes corrompus, dit cette spécialiste en droit des affaires pour expliquer sa vocation singulière née d’une »éducation protestante et artistique".

La carrière de cette élégante quinquagénaire débute dans les années 1980 chez Air Gabon, dont elle sera conseil pendant 14 ans. Elle finira par un coup d’éclat en se retournant contre son client qui refusait de lui payer ses honoraires : elle fait alors saisir un Boeing 747 de la compagnie.

« C’est (l’ancien président Omar) Bongo qui a fini par payer », lance l’avocate.

En France, elle fait une rencontre décisive avec Sylvia Roth, veuve du richissime marchand d’art Daniel Wildenstein, mort en 2001.

Alec et Guy Wildenstein, deux fils nés d’un premier mariage avaient persuadé leur belle-mère de renoncer à la succession.

« J’ai d’abord essayé de négocier. Mais ils avaient déjà commencé à la spolier » accuse Me Dumont-Beghi qui dit éprouver une réelle empathie pour sa cliente, ex-mannequin, ex lieutenant de l’armée israélienne, « une guerrière ».

Responsable de la succession, son confrère Me Jean-Luc Chartier la considère plutôt comme une semeuse de zizanie qui a empoisonné les rapports entre Mme Roth et ses beaux-fils, « qu’elle considérait comme ses enfants ».

Faute de solution amiable, l’avocate saisit la justice et gagne en 2005 l’annulation de la renonciation à la succession et la désignation d’un expert.

Ce dernier « a établi un rapport de 1 à 200 entre ce qui avait été déclaré » par les héritiers, quelque 43 millions d’euros, dit Me Dumont-Beghi.

La justice soupçonne aujourd’hui Guy Wildenstein, donateur de l’UMP proche de Nicolas Sarkozy, d’avoir dissimulé une large part de la fortune en versant de nombreuses œuvres d’art dans des fonds (trusts) hébergés dans des paradis fiscaux.

Me Dumont-Beghi ouvre alors la chasse aux trusts, à la recherche de tableaux dissimulés.

Sa trouvaille la plus connue, le « joueur de luth », un Caravage.

Elle multiplie les dépôt de plaintes contre Guy Wildenstein, unique héritier depuis le décès de son frère Alec en 2008 et continue le combat après la mort de Me Roth fin 2010.

En 2008, la cour d’appel de Paris avait déjà évoqué des soupçons d’évasion fiscale. Début 2011, des juges d’instruction alertent le ministère des Finances avant prescription des faits le 31 décembre.

Me Dumont-Beghi, qui dit ne « jamais rien lâcher », multiplie les courriers à Bercy, lequel porte plainte pour fraude fiscale contre M. Wildenstein. Le parquet de Paris a ouvert une information judiciaire début octobre.

« Maintenant, les juges sont libres d’enquêter », se réjouit l’avocate.

Autre cheval de bataille : la location en 2004, puis la vente en 2009 à l’Etat de la salle Pleyel à Paris. L’avocate soupçonne un montage financier douteux destiné à organiser l’évasion dans des paradis fiscaux du patrimoine du propriétaire de la salle de concert, Hubert Martigny, fondateur du groupe Altran et adhérent UMP.

Le parquet avait classé sans suite la plainte pour blanchiment d’argent, mais une instruction a été ouverte début octobre, après une nouvelle plainte avec constitution de partie civile.

Son confrère Antoine Athias admire la détermination de Me Dumont-Beghi. « Elle s’expose parce qu’elle ne transige pas » mais « elle ne mesure pas les risques qu’elle peut prendre ».

Un nouveau chantier s’ouvre à elle : l’avocate est saisie par une héritière du célèbre collectionneur Aimé Maeght.

© 2011 AFP

Publié avec l’aimable autorisation de l’Agence France Presse.

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