Saint-Jean-Cap-Ferrat, nouvelle adresse rêvée des milliardaires russes

Vendredi 7 septembre 2012

Saint-Jean-Cap-Ferrat, nouvelle adresse rêvée des milliardaires russes

AFP - Publié le 07/09/2012 à 08:55

La presqu’île de Saint-Jean-Cap-Ferrat, 282 hectares peuplés de villas sous les pinèdes de la Côte d’Azur, est devenue l’un des endroits les plus chers de la planète, convoité désormais par une élite de milliardaires venus de l’Est.

« Cet été, il y a eu moins de fêtes », constate René Vestri, maire depuis 30 ans de cette commune mondialement célèbre, qui n’abrite pourtant que 2.200 habitants. L’édile a parfois assisté à des soirées fastueuses, comme celle d’un propriétaire tchétchène arrivant du ciel suspendu à une grue, en jouant du tambour.

Attention, ce n’est pas Saint-Tropez, temple ostentatoire de la fête. A Saint-Jean-Cap-Ferrat, refuge des grandes fortunes industrielles, on cultive la discrétion derrière des portails infranchissables.

Les nouveaux arrivants russes, ukrainiens ou kazakhs du « Cap », s’aventurent rarement dans le village commerçant plus modeste, autour du port. « C’est étanche, ils sont toujours entourés de gardes du corps », décrit le maire. Deux mondes cohabitent ainsi, sans se croiser.

Cette langue de terre -proche de l’aéroport de Nice pour poser son jet privé- forme un havre de verdure non constructible malgré l’immensité de certaines propriétés. « Acheter à Saint-Jean, c’est comme mettre de l’argent dans un coffre, c’est une valeur sûre », vante Cyrille Jalon, de la branche immobilière de Sotheby’s.

Mille personnes travaillent en permanence sur les villas, parfois faites et refaites sans être habitées. Une maison sans vue mer atteint quatre millions d’euros, une belle villa face à la Méditerranée s’achète 20 à 30 millions, une propriété d’exception coûte facilement le double. Et pour convaincre un propriétaire de vendre, il n’y a pas de limites…

« Avec un client russe, j’ai fait le tour de la Côte d’Azur en une semaine, en passant par Cap d’Antibes, Mougins et Saint-Tropez. Finalement, il veut exclusivement Saint-Jean-Cap-Ferrat », raconte M. Jalon.

« C’est un mythe ici, la demande est constante, même si les acheteurs réfléchissent maintenant plus longtemps », confirme Barbara Cochran, conseillère immobilier pour le réseau international Engel & Völkers.

« Le problème, c’est qu’il y a des villas sans vue mer », regrette cette néo-zélandaise multilingue (assistée par une réceptionniste russe), en commentant deux fiches de villas à 22 millions d’euros, de qualité inégale.

« J’ai un nouveau client qui cherche avec un budget de 182 millions », confie-t-elle, l’œil gourmand, sans toutefois mentionner quelle propriété pourrait valoir une telle fortune.

La Villa Leopolda, qui domine la presqu’île depuis Villefranche-sur-mer, avait été vendue en 2008 par la veuve du banquier Edmond Safra, au prix record de 370 millions d’euros, à l’oligarque russe Mikhaïl Prokhorov (qui se désista et perdit 39 millions d’arrhes).

A de tels tarifs, la concurrence est âpre entre agences immobilières, qui s’espionnent. Un milliardaire ne passe pas la porte spontanément : il faut aller le chercher via ses « réseaux », papillonner dans les yachts-shows en soignant les capitaines, les cocktails des banques monégasques et les présentations de joailliers. Il faut voyager aussi, à Londres, Moscou, New York ou Hong-Kong, pour croiser des milliardaires dans des ventes aux enchères.

« Les Français vendent, ils n’arrivent plus à payer l’impôt sur la fortune. Tous les jours, ils sont sous la pression des Russes », regrette M. Vestri. Son pire cauchemar serait une ville fantôme l’hiver, sans école primaire, sans commerces. Heureusement, la taxe communale sur les ventes, plus dix ans de flambée immobilière, génèrent 20 millions d’excédent annuel. Quelque 150 appartements ont été préemptés et rachetés par la municipalité pour en faire des logements sociaux et éviter l’exode.

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