Dans « Le Capital », Costa-Gavras dénonce les anti-Robins des bois des temps de crise

Mardi 13 novembre 2012

Dans « Le Capital », Costa-Gavras dénonce les anti-Robins des bois des temps de crise

AFP- Publié le 13/11/2012 à 12:34

Anti-Robins des bois des temps de crise, qui « prennent aux pauvres pour donner aux riches », des spéculateurs sans scrupules peuplent le nouveau film de Costa-Gavras, « Le Capital », mercredi en salles, récemment présenté par le réalisateur en Grèce, pays le plus touché en Europe.

Tiré du roman éponyme de Stéphane Osmont, « Le Capital », référence au célèbre ouvrage de Karl Marx, raconte l’ascension d’un jeune polytechnicien, Marc Tourneuil, dans le monde de la finance et de la spéculation lancé dans une course folle aux profits, laissant pays et individus exsangues.

Incarné par le comique Gad Elmaleh, crédible dans ce rôle à contre-emploi, Tourneuil est un homme intelligent et séduisant qui jongle avec la bourse et rêve de « pouvoir » pour être « respecté ».

« Quand Costa-Gavras m’a proposé le rôle, j’ai été très surpris. C’est un virage à 180 degrés dans ma carrière ! J’avais le trac, j’avais peur de ne pas être à la hauteur », a affirmé le comédien à l’AFP.

Selon lui, "notre ennemi, ce n’est pas le monde de la finance, c’est la dérive du système financier, c’est la corruption, le capitalisme sauvage. Je suis devenu cynique par rapport à tout ça. Si demain, je vais retirer mon argent à la banque et qu’on me dit qu’il n’y en a plus, je serai énervé, mais pas étonné", a-t-il ajouté.

Au début du film, Tourneuil est bombardé président de la Phénix, banque fictive française dont le précédent président vient de subir une attaque cardiaque. Les membres du conseil d’administration, qui l’imaginent manipulable parce que sans expérience, se servent de lui en attendant que l’ancien directeur recouvre la santé.

Mais ce surdoué de la finance se révèle redoutable et finit par déjouer complots et contre-complots, notamment d’un fonds de pension américain qui veut mettre la main sur Phénix, supplantant tout le monde pour devenir le patron incontesté du groupe financier.

Goût du luxe

« Produits toxiques », « paradis fiscaux », « hedges funds » sont les valeurs dans lesquelles il se reconnaît parce que ce sont les seules à lui procurer ce qu’il aime le plus au monde : l’argent. « Mais pourquoi as-tu besoin de tout cet argent ? », lui demande, interloquée, sa femme (Natacha Régnier), qui finira par ne plus aimer l’homme nouveau et sans morale qu’il est devenu.

Avec l’argent lui viendra le goût du luxe - il oblige son épouse, qui trouve cela « indécent », à porter lors d’une soirée une robe à 22.000 euros - et celui des tops models. Sans illusions, il sait aussi que tout cela est « un jeu ».

Quatre ans après le début de la crise financière, Costa-Gavras, cinéaste engagé (L’Aveu, Z, Missing, Le couperet…) décortique avec maestria un milieu « vaniteux, futile et clanique ».

Son film, dont il a eu l’idée après avoir lu le livre de l’économiste Jean Peyrelevade, « Capitalisme total », puis celui de Stéphane Osmont, happe l’attention du spectateur-citoyen en le plongeant à un rythme soutenu dans une actualité de plus en plus anxiogène.

« Aujourd’hui, tout le monde parle des marchés et personne ne sait qui ils sont. Ils sont devenus la nouvelle idéologie », a-t-il affirmé à l’AFP. « Du temps des communistes, il y avait la soumission au parti. Maintenant, c’est la soumission aux marchés », déplore-t-il.

Le réalisateur a récemment présenté son film en Grèce, son pays d’origine et le plus touché par la crise, ainsi qu’en Espagne, deux nations où « Le capital » a été « beaucoup applaudi », affirme-t-il.

Costa-Gavras se veut malgré tout « raisonnablement optimiste ». « Quand il y a de plus en plus de problèmes, on finit par trouver une solution, c’est la nature du genre humain », affirme-t-il.

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