Évasion fiscale : la France ouvre une enquête sur la banque Reyl

Vendredi 14 juin 2013

Évasion fiscale : la France ouvre une enquête sur la banque Reyl

Le Point.fr - Publié le 14/06/2013 à 15:58 - Modifié le 14/06/2013 à 17:50

La décision du parquet de Paris fait suite aux déclarations d’un ancien cadre de la banque interrogé dans le cadre de l’affaire Cahuzac.

Source AFP

La justice française a décidé de mener une enquête visant la banque suisse Reyl, au centre de l’affaire Cahuzac, et qui abriterait de nombreux comptes de Français fortunés, dont, à en croire un de ses anciens employés, des personnalités politiques. Contactée, la banque genevoise n’avait pas réagi en fin d’après-midi. Fin mai, le parquet de Paris a ouvert une information judiciaire contre X visant les activités de cet établissement genevois, comme l’a révélé lemonde.fr. Confiée aux juges Renaud van Ruymbeke et Roger Le Loire, l’enquête pour « blanchiment de fraude fiscale » fait suite aux déclarations, le 18 avril devant les juges, d’un ancien cadre de la banque, Pierre Condamin-Gerbier, interrogé comme témoin dans l’affaire Cahuzac.

Sans citer de nom, Pierre Condamin-Gerbier avait indiqué que d’autres contribuables français avaient des avoirs dans cette banque. Les juges Roger Le Loire et Renaud van Ruymbeke avaient alors demandé au parquet d’élargir l’enquête à d’éventuels autres détenteurs de comptes non déclarés en Suisse. Le parquet a donné son feu vert le 31 mai en ouvrant une information judiciaire distincte de celle visant Jérôme Cahuzac. Soupçonné d’avoir eu des avoirs non déclarés à l’étranger, Jérôme Cahuzac est poursuivi notamment pour « blanchiment de fraude fiscale ». Après l’avoir nié, l’ex-ministre du Budget avait finalement avoué avoir placé quelque 685 000 euros sur un compte, ouvert en Suisse en 1992 puis déplacé à l’automne 2009 à Singapour. Rapatriée en France, la somme a été bloquée par la justice française mi-mai.

La nouvelle information judiciaire visant la banque Reyl a été ouverte pour « blanchiment de fraude fiscale et »blanchiment de fraude fiscale en utilisant les facilités procurées par l’exercice d’une activité professionnelle, notamment celle de banquier". Elle vise les activités de la banque et de ses clients. Jeudi devant les députés et la presse, Pierre Condamin-Gerbier a affirmé disposer d’une liste « d’une quinzaine » de noms d’ex-ministres ou d’actuels ministres détenteurs d’un compte en Suisse. Il a aussi déclaré que ses documents, « des éléments de preuve », avaient été remis à « une partie tiers ». Vendredi, Europe 1 a fait état d’un document à en-tête de la banque suisse, exposant les modalités d’une transaction entre un homme politique français et un homme d’affaires.

Cahuzac en « fusible »

Pour l’ancien cadre de la banque Reyl, Jérôme Cahuzac n’est du reste qu’un « fusible ». Car « on dit que c’est le mensonge d’un homme, mais des Cahuzac, il y en a d’autres ». « C’est le mensonge d’un système et d’un État. » Interrogé sur l’éventuelle divulgation des noms de la liste qu’il dit détenir, il a répondu : « J’attends le bon moment pour le faire. » Fin avril, il avait assuré dans un entretien qu’il n’avait pas donné aux juges les noms d’éventuels autres détenteurs de comptes non déclarés en Suisse. Que de nombreux responsables politiques français aient utilisé des places financières comme la Suisse pour eux-mêmes ou pour leur parti est un « secret de Polichinelle », avait dit Pierre Condamin-Gerbier, responsable de l’UMP en Suisse jusqu’à 2009.

Jeudi, la banque genevoise Reyl, qui avait confirmé en avril l’existence du compte de Jérôme Cahuzac, avait démenti les affirmations de son ancien salarié et dénoncé « les nombreux amalgames et allégations véhiculés par les médias sur la base d’affirmations erronées ». Le groupe bancaire « n’entretient aucune relation de compte (titulaires ou ayants droit) avec des résidents français exerçant des charges politiques », a-t-il affirmé dans un communiqué. La banque Reyl & Cie est une petite banque genevoise fondée par un Français, Dominique Reyl, en 1988, à Genève. La société de Bourse a ouvert en 2004 une filiale en France, à Paris, puis en 2009 à Luxembourg et en 2010 à Singapour. Pierre Condamin-Gerbier y a travaillé de 2006 à 2010. Il a dirigé pendant cette période la division Reyl Private Office, qui s’occupe de tous les problèmes autres que bancaires des clients.

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