Le dossier des frégates de Taiwan vers l’oubli judiciaire

Mardi 22 avril 2008 — Dernier ajout lundi 21 mai 2007

Le dossier des frégates de Taiwan vers l’oubli judiciaire

Jeudi 12 octobre 2006, 17h31

PARIS (Reuters) - L’enquête judiciaire sur une vente de frégates militaires à Taiwan en 1991 a été close après cinq ans d’investigations infructueuses, apprend-on de source judiciaire.

Elle pourrait s’achever sans que les bénéficiaires d’une présumée corruption en Chine, à Taiwan et en France aient été confondus.

Les juges d’instruction financiers Renaud Van Ruymbeke et Xavière Simeoni, chargés de l’information ouverte en juin 2001 pour « abus de biens sociaux », ont notifié mercredi aux parties, le parquet de Paris et Thales, partie civile, la fin de la procédure, souligne-t-on de même source.

Le parquet et Thales ont désormais un délai légal de vingt jours pour demander des investigations complémentaires, faute de quoi un non-lieu sera inévitablement rendu, aucune mise en examen n’ayant jamais été prononcée.

Les juges Van Ruymbeke et Simeoni ont tiré les conséquences du refus opposé le 2 octobre par le ministre de l’Economie Thierry Breton à leur demande de levée du secret-défense sur des documents détenus par les douanes à Bercy.

Ces documents sont les listes des bénéficiaires de commissions commerciales déclarées en 1991 par les opérateurs du marchés des frégates, Thomson, devenu Thales et la Direction des constructions navales.

Les six frégates « Lafayette » de Thomson, devenu Thales, ont été vendues en 1991 pour 16,4 milliards de FF (2,5 milliards d’euros) à Taipeh, après un long ballet diplomatique entre la France, la Chine et Taiwan.

Les juges espéraient que les listes de Bercy les mettraient sur la piste des bénéficiaires supposés de la corruption. De nombreux éléments du dossier laissent en effet penser que des opérations de corruption ont été menées en Chine, à Taiwan et en France.

Thierry Breton a pris la même décision que Francis Mer, son prédécesseur du gouvernement Raffarin et Laurent Fabius, ministre PS de l’Economie sous le gouvernement Jospin.

MORTS SUSPECTES

En mai dernier, dans une interview à France Info, l’ex-ministre PS de la Défense Alain Richard a ainsi évoqué un possible financement politique occulte en France. Dans un entretien au journal Le Figaro, en mars 1998, l’ancien ministre des Affaires étrangères PS Roland Dumas a déclaré que des commissions de 500 millions de dollars avaient été versées.

L’enquête de Paris avait été ouverte après la saisie en Suisse de plus de 500 millions de dollars sur les comptes bancaires d’Andrew Wang, un intermédiaire taiwanais intervenu dans la vente.

Ce dernier en demande maintenant la rétrocession et les sommes sont au cœur d’une bataille diplomatique. Une clause du contrat entre Thomson et Taiwan, révélée lors de l’enquête judiciaire, prévoyait que l’Etat français devrait de l’argent à Taiwan si le versement de commissions occultes était avéré. La facture potentielle est de 700 millions d’euros pour la France.

Selon le Canard enchaîné, Dominique de Villepin a envoyé en 2005 et l’été dernier deux émissaires successifs en Suisse pour tenter d’obtenir des autorités suisses que l’argent d’Andrew Wang soit remis à Taipeh, afin de solder le litige. L’affaire est à l’origine du scandale sur les faux listings de l’affaire Clearstream. Ce sont en effet les identités des bénéficiaires supposés des commissions occultes des frégates que l’ex-vice président d’EADS Jean-Louis Gergorin a remis au printemps 2004 au juge Van Ruymbeke.

Le listing s’est avéré être faux. Plusieurs morts violentes non élucidées ont par ailleurs émaillé l’affaire, comme celle de Thierry Imbot, ex-agent des services secrets français à Taiwan, tombé par la fenêtre de son logement le 10 octobre 2000, et celle d’un ex-cadre de Thomson ayant négocié le contrat, Jacques Morisson, tombé lui aussi de la fenêtre de son appartement, le 18 mai 2001, à Neuilly-sur-Seine.

© REUTERS

Publié avec l’aimable autorisation de l’Agence Reuters.

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