L’opposant et oligarque kazakh Abliazov reste en prison

Vendredi 23 août 2013

Société

L’opposant et oligarque kazakh Abliazov reste en prison

22 août 2013 à 16:07 (Mis à jour : 17:06)

Par AFP

La justice française a rejeté jeudi la demande de remise en liberté de l’opposant et oligarque kazakh Moukhtar Abliazov, une décision qui n’entame pas l’optimisme de ses avocats sur le fond, qui espèrent un rejet de sa demande d’extradition en septembre.

Saisie le 6 août, moins d’une semaine après l’interpellation spectaculaire de M. Abliazov, le 31 juillet dans sa villa de Mouans-Sartoux (Alpes-Maritimes) par une brigade d’intervention de la PJ de Nice, soutenue par un hélicoptère, la chambre de l’instruction de la cour d’appel d’Aix-en-Provence aurait principalement fait valoir des arguments de sécurité pour motiver son refus, selon ses avocats.

« La cour a avant tout considéré qu’elle était mieux assurée à l’intérieur du centre pénitentiaire de Luynes (où il est détenu depuis le 1er août, ndlr) qu’à l’extérieur. Cela renforce notre point de vue : le Kazakhstan fera tout pour faire taire un opposant comme M. Abliazov », a déclaré son avocat, Me Bruno Rebstock.

Ancien ministre de l’énergie kazakh (1999), Moukhtar Abliazov est fondateur du parti d’opposition à Noursoultan Nazarbaïev, Choix démocratique (2002).

Depuis qu’il a quitté son pays en 2009 pour Londres au moment de la nationalisation forcée de la banque BTA qu’il dirigeait, M. Abliazov serait pisté par les services secrets kazakhs, assurent ses avocats et ses proches. La banque a fait part de sa « satisfaction » après la décision d’Aix-en-Provence.

La BTA, qui lui reproche d’avoir détourné à son profit 6 milliards de dollars, s’était d’ailleurs targuée d’avoir contribué à le localiser, quelques heures à peine après son interpellation.

A l’issue de ces débats à huis clos, la chambre de l’instruction a également mis en avant les « facilités à circuler au sein de l’espace européen » de M. Abliazov, une allusion à une possible fuite de l’homme d’affaires, qui a déjà quitté clandestinement l’Angleterre début 2012 peu avant d’être condamné pour outrage à magistrat dans l’affaire BTA, pour n’avoir pas voulu donner à la justice les noms de ses partenaires, pour mieux les protéger.

Sa fuite était également justifiée par les risques de kidnapping imminent dont la police londonienne l’avait averti.

Un règlement de comptes politique ?

Cette décision des magistrats jeudi « est une déception bien sûr », selon Me Rebstoff, qui affirme que son client l’a accueillie « avec fatalisme » mais qu’il restait toutefois « combatif ».

Présente au tribunal, sa fille aînée Madina Abliazov, 25 ans, s’est montrée plus philosophe : « je comprends les juges, c’est un dossier tellement complexe… Mais j’aurais aimé qu’il sorte, qu’il puisse enfin s’expliquer, et prouver son innocence ».

Famille et avocats ne cessent en effet d’affirmer que M. Abliazov est victime d’un règlement de comptes politique de la part du régime de fer de M. Nazarbaïev. Et que derrière la demande d’extradition formulée par l’Ukraine, à l’origine d’un mandat d’arrêt d’Interpol qui a conduit à son arrestation, il faut bel et bien voir la main du Kazakhstan à qui, in fine, il serait remis.

L’examen de cette demande d’extradition devrait avoir lieu fin septembre, selon Me Rebstock, qui assure que la cour a été jeudi « très à l’écoute de ces arguments de fond », notamment du fait que l’ONU et Amnesty International aient apporté leur soutien à son client. Lequel a bénéficié, de surcroît, d’un statut de réfugié politique en Angleterre.

M. Abliazov « s’est exprimé longuement sur ce contexte géopolitique » devant le juge, a ajouté Me Rebstock, accompagné d’un autre avocat, le Canadien Peter Sahlas, du barreau de New York.

L’Ukraine devrait adresser au Quai d’Orsay d’ici le 10 septembre les pièces du dossier d’extradition. Sa demande est officiellement fondée sur les pertes qu’aurait subies BTA sur son territoire, où la première banque kazakhe est également implantée.

« Je suis confiant sur le fond, et considère que ce refus de remise en liberté ne préjuge en rien de la décision » sur la demande d’extradition, a conclu Me Rebstock.

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