Jean-Yves Ollivier, les confessions d’un Français de l’ombre qui aimait la Suisse

Samedi 23 novembre 2013 — Dernier ajout mardi 19 février 2019

MATIÈRES PREMIÈRES Samedi 09 novembre 2013

Jean-Yves Ollivier, les confessions d’un Français de l’ombre qui aimait la Suisse

Sylvain Besson

Le plus mystérieux des intermédiaires sort un film sur sa vie de diplomate informel. Il déplore que la Suisse ne sache plus protéger un minimum d’opacité

Il a longtemps pensé emporter ses secrets dans la tombe. Ceux d’un brasseur d’affaires opérant à la lisière de l’Etat et de l’économie, sillonnant la planète loin des regards, répartissant les profits de méga-contrats dans des bureaux fiduciaires liechtensteinois. « Je travaille à partir de 150 millions de dollars et plus », précise Jean-Yves Ollivier avec une touche de fierté dans la voix. « Et je peux rencontrer n’importe quel chef d’Etat du monde. »

Dans les années 1990 et 2000, juges et médias ont martyrisé cette caste d’intermédiaires de haut vol, rouages centraux des affaires de financement politique occulte. Certains ont été emprisonnés, d’autres sont morts sans avoir livré leur vérité.

Dans les années 1990, l’intermédiaire vivait à Genève et contrôlait Gestilac, une société qui introduisait, entre autres activités, des entreprises françaises sur le marché sud-africain. Puis le vent des « affaires » a commencé à souffler : d’abord Elf, enquête tentaculaire qui a fait tomber l’un de ses associés, l’ancien agent secret Pierre Lethier, puis les frégates de Taïwan, où le nom de Gestilac est brièvement mentionné.

« Il y a tellement de gens qui ont vu leur nom apparaître dans la presse et qui ont été bloqués », soupire Jean-Yves Ollivier. « A cette époque, Bertossa (il prononce « Bertoza ») ouvre une brèche terrible, il est le premier à briser le secret bancaire et il instruit à charge. C’est un système ignominieux, mené en complicité avec les juges d’instruction français. »

En 2001, l’homme d’affaires déménage à Zurich, où la menace judiciaire semble moins aiguë. « Zurich était resté assez conservateur là-dessus : le procureur, avant d’engager une instruction, allait être plus prudent – et il continue de l’être aujourd’hui. » Lire la suite sur le site du journal Le Temps.

Petit rappel françafricain sur la vie de ce « grand humaniste » par Mariama Keita

Né en 1944 à Alger, Jean-Yves Ollivier est un ancien membre de l’OAS. Il débute aux Charbonnages de France (Caminade, Comores p.167). Il monte une affaire, la Comoil dans le commerce pétrolier en Afrique du Sud. Il contourne l’embargo contre l’apartheid en échangeant du charbon contre du pétrole (Noir Silence. p.137-138). Il est proche de Michel Roussin, bras droit de Jacques Chirac à la mairie de Paris (Noir Silence. p.137,397). Il serait à l’origine d’un grand troc, pétrole contre armes, entre l’Iran et l’Afrique du Sud, via les Comores (Francafrique. p. 192).

En 1987, il est l’artisan d’une négociation Angola, Unita, Afrique du Sud, en vue d’obtenir la libération du Français Pierre-André Albertini. Le deal aurait impliqué la livraison de missiles sol-air Mistral à l’Afrique du Sud via le Congo-Brazza. Dulcie September aurait pu en être informée (Francafrique. p. 196). Elle sera assassinée le 29 mars 1988.

Il est présenté à Jean-Christophe Mitterrand par Jeanny Lorgeoux (Caminade p. 167). Avec son associé Saïd Hillali et Jean-Christophe Mitterrand, Ollivier tente en juillet 1989 de convaincre le président Abdallah de se séparer de Bob Denard au profit de Barril (Noir Silence. p.138). C’est ce dernier qui va liquider Abdallah, le 25 novembre 1989 (Caminade / Comore Mayotte p. 99).

En juin 1994, le colonel Bagosora obtient une livraison d’armes en provenance des Seychelles. Il est allé négocier avec le Sud-Africain Petrus Willem Ehlers. Celui-ci est en contact avec Jean-Yves Ollivier, lui-même proche de Michel Roussin (CEC p.128, L’Inavouable, p.203). En 1995, après le putsch avorté de Denard, Saïd Hillali reste conseiller du nouveau président des Comores, Mohammed Taki (Noir Silence. p.142)

Ami de Sassou Ngesso, il contribue à sa reprise du pouvoir en 1997, au bout d’une sanglante guerre civile (Noir Sil. p.54, 399). Il est actionnaire avec la fille de Sassou d’une compagnie de téléphone mobile (ibid. p63).

En 1999, Ollivier tente pour le compte de L’Elysée une opération de rapprochement entre Kabila, et des mobutistes comme Jean-Pierre Bemba (Noir Silence. p.130).

En affaires, Ollivier travaille pour le compte de Total et de Bolloré. Il aide Alain Madelin à se constituer un réseau africain (Noir Silence. p.401).

Selon Pierre Caminade, Jean-Yves Ollivier et le lieutenant-colonel Ollivier, officier traitant d’Alfred Sirven à la DGSE ne feraient qu’un (Comores Mayotte p. 165).

Revenir en haut