Biens mal acquis et mal rendu ?

Jeudi 6 février 2014

Biens mal acquis et mal rendu ?

Par Xavier Monnier dim, 02/02/2014 - 23:30

Sept ans après la première plainte de l’association Sherpa dans l’affaire des biens mal acquis des dictateurs africains, s’ouvre la perspective de grands procès. Et de nouvelles difficultés.

[…] Pour près de 100 millions d’euros confisqués

« On en est à près de 100 millions d’euros saisis », estime l’un des avocats de la Guinée Equatoriale, petit Etat devenu la nouvelle puissance pétrolière du continent au tournant du XXIe siècle. Et le conseil de faire un peu de prédiction judiciaire. « A priori, les dossiers seront saucissonnés, avec un volet Congo, un volet Gabon et un volet Guinée Equatoriale. » L’homme de loi pronostique même les réquisitions qui seront proposées par le parquet, pour blanchiment et recel de détournements de fonds publics. « S’ils demandent moins de 8 ans, cela sera ridicule », glisse-t-il dans un sourire carnassier, avant de décrire la simplicité de sa stratégie de défense. « On reproche à M. Obiang d’avoir été entrepreneur dans le bois avec la Somagui et ministre de l’Agriculture et des Forets. C’est peut-être moralement condamnable, mais en Guinée c’est légal ». Et de s’amuser de l’épineuse question de la restitution des avoirs et biens confisqués. Sans trop présager de l’avenir, les règnes des familles Sassou, Bongo et Obiang ne sont pas près de s’achever. Du moins dans un futur proche. Or l’argent saisi par la justice française au nom de détournements de fonds publics par les membres de ces familles devrait, en toute logique, être rendu aux pays… dirigés par ces mêmes familles. Un retour à l’envoyeur guère satisfaisant, d’autant que la confusion entre argent public et cagnotte privée ne semble pas, de Malabo à Brazzaville en passant par Libreville, être une pratique dépassée. Garder l’argent ouvrirait a contrario un boulevard à ces familles, au discours déjà rôdé sur le pillage par une justice coloniale des ressources de leurs pays…

Un saisi pour un rendu ?

Ce léger souci a été au cœur du colloque organisé par Sherpa et l’Observatoire géopolitique des criminalités, le 31 janvier dernier. « Rendre des avoirs à des Etats de droit ne pose pas de souci, a résumé Bertrand Bertossa, ancien procureur général de Genève. Mais quand les dictateurs sont encore au pouvoir, comme au Gabon ou quand les Etats sont faibles ? En Suisse, nous avions restitué 18 millions de dollars à l’Ukraine, placés dans une fondation qui devait réaliser des travaux d’intérêt publics, ce n’est pas franchement satisfaisant ». Lire la suite.

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