Paradis fiscaux : une aristocratie prête à tout pour de l’argent ?

Lundi 14 septembre 2015

Critique

Paradis fiscaux : une aristocratie prête à tout pour de l’argent ?

Par Anastasia Vécrin — 10 septembre 2015 à 18:06 (mis à jour à 18:06)

Dans leur nouveau livre enquête, les sociologues Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot décrivent un système où énarques, fiscalistes, responsables politiques naviguent dans le même monde depuis longtemps.

Dans l’atmosphère de secret et de silence qui règne autour de l’évasion fiscale, parfois quelques mots font grand bruit : SwissLeaks, LuxLeaks ou Clearstream… Des noms obscurs qui désignent des affaires tout aussi obscures de fraude fiscale. Pour sortir de ce brouillard, les sociologues Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot font paraître, cette semaine, un essai à la fois lumineux et exaspérant sur le sujet.

Mettons tout de suite les choses au clair : entre les entreprises et les particuliers, il s’agirait de presque « 600 milliards qui manque(raient) à la France » selon l’essai du même nom du journaliste à la Croix Antoine Peillon (1). Pas une mince affaire. Surtout dans ce contexte de crise où l’on traque les chômeurs, dépouille la classe moyenne et réduit les budgets de tous les services publics.

Tentative d’évasion (fiscale) commence sur une boutade : les Pinçon-Charlot décident d’ouvrir un compte en Suisse afin d’extrader leur maigre fortune. C’est parti pour un voyage de 240 pages en Suisse et au Luxembourg, ces contrées où tout n’est que luxe, calme et volupté, mais surtout dans les méandres des montages financiers, des banques UBS et HSBC et des couloirs de Bercy.

S’appuyant sur plusieurs enquêtes sur le sujet, l’ouvrage est une synthèse ludique et pédagogique dont la valeur ajoutée réside dans les familières « lunettes » Pinçon Charlot : cette sociologie aigre-douce de la classe dominante dans sa pratique de l’évasion fiscale. « On en a bavé pour cette enquête, les livres étaient rasoirs, il fallait en faire quelque chose de drôle et ce n’était vraiment pas évident », raconte Monique Pinçon-Charlot.

Pris par la main, le lecteur parcourt, avec les sociologues, les bords du lac Léman, une vente aux enchères d’horlogerie suisse, le quartier européen du Luxembourg où se négocient les accords fiscaux entre le grand duché et Apple, Amazon, Ikea ou LVMH.

On prend le tram 14 pour découvrir un port franc de la banlieue de Genève, coffre-fort de 22 000 mètres carrés, qui abriteraient mille tableaux de Picasso et un million d’autres œuvres. Le marché de l’art constitue l’un des moyens d’évasion fiscale et de blanchiment d’argent utilisé par les nantis. Lire la suite sur le site du journal Libération.

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