Poursuites pénales pour corruption contre Lula

Jeudi 10 mars 2016

Poursuites pénales pour corruption contre Lula

AFP Mercredi, 9 mars 2016 20:33 MISE à JOUR Mercredi, 9 mars 2016 20:42

Sao Paulo - Un procureur de Sao Paulo a requis mercredi des poursuites pénales contre l’ex-président brésilien de gauche Luiz Inacio Lula da Silva, déjà soupçonné de corruption dans l’enquête parallèle sur le scandale de corruption Petrobras. « Il s’agit d’une dénonciation pour occultation de biens et blanchiment d’argent » a indiqué à l’AFP une source du ministère public de Sao Paulo ayant requis l’anonymat. L’enquête porte sur un appartement triplex de Guaruja, une station balnéaire de l’Etat de Sao Paulo, qui est au nom d’une entreprise de construction impliquée dans le scandale Petrobras et dont Lula nie être le propriétaire, contrairement aux soupçons du parquet.

La dénonciation du parquet de Sao Paulo a été transmise à un tribunal local qui devra décider s’il donne suite, ou non, aux demandes de poursuites pénales contre l’icône de la gauche brésilienne. L’ancien président de gauche a déjà été interrogé sur cet appartement vendredi après sa brève interpellation dans le cadre de l’enquête sur le tentaculaire scandale de corruption autour du géant étatique pétrolier Petrobras, qui fait trembler la classe politique et les puissants patrons du BTP brésilien.

Les procureurs en charge du dossier Petrobras avaient assuré vendredi dans un document rendu public avoir recueilli des indices selon lesquels Lula et son Institut auraient reçu de nombreuses faveurs d’entreprises de construction impliquées dans les détournement de fonds au sein de Petrobras. Concernant l’appartement visé par la dénonciation du parquet de Sao Paulo, ils avaient mentionné « des indices selon lesquels Lula a reçu en 2014 au moins un million de reais (264 000 dollars) apparemment sans justificatif de l’entreprise OAS par le biais de réformes et meubles de luxe du triplex, à Guaruj| ». « Bien que l’ex-président allègue que l’appartement n’était pas à lui car il est au nom de l’entreprise (OAS, NDLR), plusieurs preuves indiquent le contraire », ont affirmé les procureur du dossier Petrobras. Le président nie être le propriétaire réel de cet appartement, assurant qu’il avait pris un option en vue de son acquisition avant d’y renoncer. La dénonciation du parquet de Sao Paulo « confirme la partialité avec laquelle cette affaire est conduite », a dénoncé l’avocat de Lula, Cristiano Zanin Martins, cité par l’édition en ligne du quotidien Folha de Sao Paulo. « Cela confirme l’existence d’un conflit de juridiction entre le ministère public de l’Etat de Sao Paulo et le ministère public fédéral de Curutiba (en charge de l’enquête Petrobras, NDLR) qui enquêtent sur les mêmes faits », a-t-il souligné.

Lula avait réagi avec force vendredi à son humiliante interpellation par les enquêteurs du dossier Petrobras en appelant ses partisans à descendre dans les rues pour défendre le Parti des travailleurs (PT, gauche) au pouvoir. « S’ils veulent me vaincre, alors ils devront m’affronter dans les rues de ce pays », avait-il lancé dans un discours enflammé. Les partisans de l’ancien président dénoncent un complot de "l’élite" et des grands médias brésiliens pour empêcher sa probable candidature à l’élection présidentielle de 2018.

L’ancien ouvrier métallurgiste et dirigeant syndical était devenu en 2003 le premier président du Brésil issue de la classe ouvrière, dans un pays toujours marqué par de profondes inégalités sociales. Quelque 40 millions de Brésiliens sont sortis de l’extrême pauvreté sous sa présidence, grâce à un cycle économique favorable et à des programmes sociaux en faveur des plus démunis. Lula avait réussi à imposer la candidature et l’élection de sa dauphine Dilma Rousseff à l’issue de ses deux mandats. Il avait quitté la présidence avec une popularité record de plus de 80%. Ses ennuis judiciaires et les développements en cascade du scandale Petrobras ont considérablement envenimé la crise politique aigüe qui paralyse le Brésil.

La présidente Rousseff est visée par une procédure parlementaire de destitution dont l’issue semble de plus en plus incertaine. Les secteurs de l’opposition ont convoqué pour dimanche des manifestations dans tout le pays contre la corruption et la présidente, qu’ils espèrent massives pour faire pression sur les parlementaires hésitants. Les pouvoirs publics craignent des affrontements entre les pro-Lula et les anti-gouvernement à l’image des rixes qui se sont produites vendredi après l’interpellation de Lula.

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