Londres, acteur crucial des paradis fiscaux

Vendredi 8 avril 2016

Londres, acteur crucial des paradis fiscaux

7 avril 2016 | James Pheby - Agence France-Presse à Londres

Les Panama Papers n’ont pas seulement levé le voile sur les secrets financiers des riches et puissants, ils ont aussi mis en lumière le rôle central de Londres au cœur du système des paradis fiscaux.

Les dossiers du cabinet d’avocats panaméen Mossack Fonseca, qui ont été révélés dans la presse ces derniers jours, montrent les liens entre le Royaume-Uni et des milliers de firmes basées dans ces territoires à la fiscalité réduite et à la législation laxiste. Ils montrent aussi comment ces fonds discrets sont investis dans des actifs britanniques, notamment sur le très spéculatif marché londonien de l’immobilier.

« Londres est l’épicentre d’une grande partie des affaires douteuses qui ont lieu dans le monde », accuse Nicholas Shaxson, auteur du livre Les paradis fiscaux. L’expert compare la capitale au cœur d’une « toile d’araignée » qui s’étend sur de lointains territoires d’outre-mer, reliquats de l’empire, comme les îles Vierges. Sur ce seul minuscule archipel sont ainsi enregistrés 110 000 comptes du cabinet Mossack Fonseca.

Sous-traitance

Si la Grande-Bretagne elle-même est relativement transparente et vertueuse en matière financière, les affaires les plus douteuses sont sous-traitées aux territoires d’outre-mer, souvent via des sociétés-écrans anonymes, détaille Nicholas Shaxson.

« L’évasion fiscale et ce genre de pratiques ont lieu dans les parties extérieures de la toile et en général, on y retrouve des liens avec la City de Londres ou des firmes britanniques spécialisées dans la fiscalité ou la comptabilité », explique l’auteur à l’AFP.

Ces paradis fiscaux « sont tous des agents de la City, d’où est contrôlé l’ensemble du système », confirme Richard Murphy, professeur à la City University de Londres. Traduction concrète de ces circuits : un certain nombre de personnalités du monde politique et des affaires possèdent de vastes propriétés immobilières à Londres par l’intermédiaire de sociétés offshore montées avec l’aide du cabinet panaméen, selon le quotidien The Guardian.

Parmi les bénéficiaires de ces pratiques opaques — mais souvent pas illégales pour autant — figure le président des Émirats arabes unis, cheikh Khalifa ben Zayed al-Nahyane, avec un parc immobilier estimé à 1,2 milliard de livres (1,5 milliard d’euros), selon le journal.

Ces révélations viennent en contrepoint des déclarations récurrentes du gouvernement de David Cameron sur sa lutte contre les paradis fiscaux et l’évasion fiscale. Ironiquement, le premier ministre a lui-même dû s’expliquer sur sa fortune familiale, alors que feu son père Ian s’est retrouvé cité dans le scandale des Panama Papers.

Il n’est toutefois guère étonnant de retrouver Londres au centre de ces flux financiers, selon les spécialistes. La ville a su tirer profit de l’héritage de l’Empire britannique et sa tradition commerciale. « Londres est au carrefour de l’argent du monde entier depuis des siècles », souligne Nicholas Shaxson.

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