La piste genevoise des 700 millions d’un oligarque déchu

Dimanche 24 juillet 2016

La piste genevoise des 700 millions d’un oligarque déchu

Emmanuel Garessus Le Temps / Publié dimanche 24 juillet 2016 à 09:32.

D’énormes sommes d’argent aux origines russes douteuses seraient passées par la Société Générale, affirment la SonntagsZeitung et Le Matin Dimanche. Le ministère public genevois a lancé une enquête et bloqué les comptes

Vladimir Poutine est sur la piste des fonds de Sergueï Pougatchev, affirment Le Matin Dimanche et la SonntagsZeitung. L’ancien sénateur de la région de Tuva et ancien « banquier de Poutine » est tombé en disgrâce et s’est exilé en Angleterre en 2011.

Le conflit porte sur 2 milliards de dollars. L’État russe l’accuse de détournement d’argent. Les recherches des médias qui ont mené aux « Panama Papers » montrent maintenant que des centaines de millions auraient été transférés vie des sociétés offshore sur des comptes de Pougatchev à Genève à la Société Générale.

L’origine remonte à 2008 et à la Mejprombank

Selon le journal dominical, l’affaire remonte à 2008. La banque de Pougatchev, la Mejprombank, était menacée de faillite. Pour empêcher cette issue, la banque centrale russe a injecté 2 milliards de dollars. Cela n’a toutefois pas empêché l’institut de tomber en faillite. La Russie soupçonne Pougatchev d’avoir laissé tomber la banque pour s’enrichir. 700 millions de dollars seraient passés par les Etats-Unis pour atterrir en Suisse, à la Société Générale, indiquent les deux journaux.

L’argent est passé par un compte de l’institut genevois sous le nom de Safelight, une société chypriote appartenant à Sergueï Pougatchev et dirigée par son fils Alexandre, selon les deux journaux. La voie choisie est complexe. Entre février et novembre 2010, une partie de l’argent passe par cinq autres comptes de la Société Générale. Entre les versements, il ne se passe parfois que quelques heures. Le 8 novembre 292 millions arrivent sur ce compte. Chacun appartient à une autre société offshore, souvent dans les Iles vierges britanniques. C’est ce qu’indique une décision du Ministère public genevois de décembre 2014 qui figure dans les « Panama Papers ». Sergueï Pougatchev est décrit comme l’ayant-droit économique de la plupart des 14 comptes impliqués à la Société Générale. La complexité et la multitude de transactions pourraient viser à masquer l’origine de l’argent.

L’intervention du Ministère public genevois

Selon les deux journaux, la décision du Ministère public porte sur une demande d’entraide judiciaire venant de Russie. Le procureur, et le Tribunal pénal fédéral, a estimé qu’il fallait accéder à la requête.Fin 2015, Berne a donc transmis les documents à Moscou.

La justice genevoise mène sa propre enquête, selon Le Matin Dimanche et La SonntagsZeitung. « Des fonds sont actuellement bloqués » indique Henri Della Casa, porte-parole du Ministère public, sans ajouter contre qui portait la démarche. La Société Générale n’a pas répondu aux questions des deux médias et déclare avoir respecté scrupuleusement les règlementations de lutte contre le blanchiment. Une grande partie des sociétés offshore est gérée par le cabinet Mossack Fonseca, connue depuis l’affaire des Panama Papers. Les journaux notent qu’une société offshore ayant un compte à Genève a été créée au moment où Mejprombank recevait les deux milliards de dollars. L’ancien directeur de deux de ces sociétés s’est retiré et n’a pas répondu aux médias. Le cabinet panaméen s’est séparé de la totalité de ces sociétés après que Sergueï Pougatchev ait renoncé à indiquer l’origine des capitaux. L’ex-oligarque nie les faits qui lui sont reprochés. Il s’estime poursuivi pour des raisons politiques. Lire la suite.

Revenir en haut