Charles Duchaine, le juge qui a failli mourir

Mardi 2 août 2016

Portrait Charles Duchaine, le juge qui a failli mourir

[…] Cet homme à la haute stature, à l’œil rieur et à l’humour anglais, subtil mélange de flegme et de noirceur, s’amuse des péripéties qui ont failli enrayer sa machine de guerre : l’instruction judiciaire. Telle cette filature dans le Cantal par un gang en Chevrolet Camaro aux vitres teintées, qui le rêvait désarticulé par la calandre. C’étaient les années 1990, qui le virent aussi, à Monaco, harcelé par des agents secrets étrangers le pressant de se dessaisir de son dossier : « J’avais l’argent du trafic d’un cartel bolivien, les proches de mon mis en examen se faisaient abattre et je me demandais quand viendrait mon tour. Je recevais “d’aimables visites” », se souvient-il. Il a conté ses aventures sur le Rocher en 20021. Ou cette affaire de drogue dont les bénéfices finançaient le terrorisme basque : « Des gens ont voulu m’acheter, y compris des avocats. Quand on exerce à fond ce métier, on peut connaître des périodes difficiles… » C’était le temps où l’on disait encore « Charles ».

En 2016, on ne parle plus que du « juge Duchaine ». « Ah oui, le Marseillais qui a mis en examen le sénateur Jean-Noël Guérini », entend-on régulièrement. Peu importe sa naissance dans le Limousin, son parcours professionnel à Pontoise, Aurillac, Bastia, Monaco, sa nomination en septembre 2014 à l’AGRASC, il restera à jamais ce magistrat associé aux Bouches-du-Rhône dont la fonction a suppléé le prénom. Comme son collègue assassiné le juge Michel, que seuls ses proches appelaient Pierre. D’autres liens les unissent : l’obstination au travail, le courage de tenir tête aux malfrats corso-provençaux, une épouse et deux enfants inquiets, l’habitude de sillonner à moto la cité phocéenne au mépris du danger qui, les concernant, ne venait pas des chauffards. Le juge Michel en est mort ; le juge Duchaine a failli perdre la vie. C’était le 31 janvier 2013. Pour la première fois, il révèle la gravité de son accident et des événements qui l’ont précédé.

À l’époque, ce spécialiste des investigations financières enquête depuis 2009 sur les activités douteuses du sénateur (PS) Jean-Noël Guérini, puissant président du conseil général soupçonné notamment d’association de malfaiteurs, corruption et prise illégale d’intérêts.}

Avec la JIRS (juridiction interrégionale spécialisée), il tourmente d’autres barons de la sphère politico-économique, quelques mafieux, et confisque l’argent du crime. Ses ennemis sont si nombreux qu’il lui faut une protection. Parmi ses gardes du corps le suivant jusqu’au pied du Massif central chez ses parents, il y a Franck Brinsolaro, tué le 7 janvier 2015 à Charlie Hebdo. « Un policier agréable, secret, dont j’aimais la compagnie », confie-t-il. Lire la suite.

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