Les procureurs fédéraux s’attaqueront davantage aux banques

Lundi 21 novembre 2016

Les procureurs fédéraux s’attaqueront davantage aux banques

Sylvain Besson Lise Bailat Publié vendredi 11 novembre 2016 à 18:35.

Peu utilisé, l’article qui permet de condamner des entreprises dans les affaires de corruption et de blanchiment est réactivé. Une inflexion majeure qu’explique le procureur général de la Confédération, Michael Lauber

La justice suisse va poursuivre plus systématiquement les banques et les entreprises impliquées dans des cas de blanchiment ou de corruption.

Cette évolution stratégique, destinée à « protéger la place financière », passe par une application plus conséquente de l’article 102 du Code pénal, annonce le procureur général de la Confédération Michael Lauber.

Cet article permet de poursuivre pénalement une société – et pas seulement ses employés – si sa mauvaise organisation interne ne permet pas d’identifier l’auteur physique d’une infraction. Ou, alternativement, si elle n’a pas pris les mesures « raisonnables et nécessaires » pour empêcher de commettre des crimes de blanchiment d’argent, de corruption ou d’organisation criminelle, notamment.

Stratégie répressive

Depuis son introduction en 2003, l’article 102 a été peu utilisé : quatre condamnations depuis 2011, selon le Ministère public de la Confédération (MPC). Le cas le plus notable est celui d’Alstom, un fabricant de trains et d’équipements électriques sanctionné pour avoir versé des pots-de-vin à l’étranger.

Mais désormais le nombre de poursuites contre des entreprises augmente. « Disons qu’on a un nombre de cas respectable par rapport au passé », lâche Michael Lauber, qui ne veut pas en dire plus pour des « raisons tactiques ». La tendance coïncide avec la multiplication des grosses affaires financières complexes traitées par le MPC.

En mai, puis en octobre, celui-ci a annoncé des poursuites contre les banques BSI et Falcon sur la base de l’article 102. Ces établissements ont autorisé le transfert de centaines de millions de dollars qui seraient issus du pillage du fonds souverain malaisien 1MDB.

Le MPC vise aussi de plus petites structures, dont des sociétés offshore impliquées dans des affaires moins importantes, explique un avocat au fait de ces dossiers.

Cette stratégie répressive est censée « garantir l’intégrité de la place financière suisse » au moment où celle-ci est ébranlée par de colossales affaires de blanchiment, notamment le cas 1MDB et le scandale de corruption Petrobras au Brésil.

[…] Avec la réorganisation du Ministère public de la Confédération (MPC), Michael Lauber, entré en fonction en 2012, a hérité quasiment des pleins pouvoirs. Employeur, administrateur, organisateur, le Zurichois d’adoption gère son ministère de manière indépendante.

Depuis, les affaires de personnel se succèdent. La démission récente et très médiatisée de Stefan Lenz, l’un des procureurs en charge de l’important cas de corruption Petrobras, a relancé la polémique, après le licenciement de cinq autres magistrats en 2015. « Le Temps » a par ailleurs appris que le procureur Luc Leimgruber, lui aussi pièce maîtresse de l’affaire Petrobras, est en congé sabbatique.

Michael Lauber assume de manière générale sa politique du personnel. Lire la suite.

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