Odebrecht, le scandale de corruption qui secoue l’Amérique latine

Samedi 4 février 2017

Odebrecht, le scandale de corruption qui secoue l’Amérique latine

AFP Publié le : Vendredi 03 Février 2017 - 09:33 Dernière mise à jour : Vendredi 03 Février 2017 - 09:45

Chantiers majeurs paralysés, grogne populaire et arrestations en série : le scandale des pots-de-vin versés par le géant brésilien du BTP Odebrecht pour rafler des contrats dans plusieurs pays n’en finit pas de rebondir en Amérique latine.

  • Un scandale international -

L’enquête tentaculaire sur le système de corruption Petrobras au Brésil a mis en lumière les pratiques de la plus grande entreprise de construction de la région.

Déclenchée en 2014, l’opération « Lavage Express » a révélé que les groupes brésiliens de bâtiment, dont Odebrecht, avaient monté un cartel pour truquer les juteux marchés de sous-traitance du groupe pétrolier Petrobras, distribuant des pots-de-vin à des hommes politiques.

La justice d’une dizaine de pays, du Mexique à l’Argentine en passant par le Pérou, le Panama ou l’Uruguay, a demandé des informations aux procureurs brésiliens pour enquêter localement.

Pendant plus d’une décennie, l’entreprise a entretenu ce « stratagème de corruption massif » en versant près de 800 millions de dollars à des responsables gouvernementaux sur « trois continents », selon le ministère de la Justice américain. L’affaire s’étend à l’Angola et au Mozambique.

Et de nouvelles révélations explosives sont attendues, alors qu’Odebrecht a noué des accords de collaboration avec la justice afin d’obtenir des remises de peine pour 77 de ses dirigeants, dont l’ex-PDG Marcelo Odebrecht.

  • D’importants projets paralysés -

L’enquête a conduit la Banque brésilienne de Développement (BNDES) à suspendre le paiement de 3,6 milliards de dollars pour 16 projets en Argentine, au Venezuela, en République dominicaine, à Cuba, au Honduras et au Guatemala.

Les pays les plus affectés sont ceux qui ont reçu le plus de fonds de la BNDES : au Venezuela (3,1 milliards de dollars), la réalisation de six chantiers dont l’agrandissement du métro de Caracas est désormais compromise. C’est également au Venezuela où les pots-de-vin les plus importants ont été versés, après le Brésil, soit 98 millions de dollars.

En République dominicaine, qui a reçu 2,5 milliards de dollars de la BNDES, la conclusion de chantiers routiers et de construction d’une usine thermoélectrique sont en jeu.

Au Pérou, où Odebrecht a reconnu avoir versé 29 millions de dollars, le gouvernement lui a retiré la concession de construction d’un projet de gazoduc, évalué à 7 milliards de dollars. Seul 30% du chantier, qui doit parcourir le sud du pays sur 1.100 kms, a été réalisé pour l’heure.

  • Arrestations, perquisitions et auditions -

Anciens ministres ou fonctionnaires : les arrestations et auditions se multiplient sur tout le continent. Parfois, des proches des présidents sont inquiétés. C’est le cas en Argentine, où le chef des renseignements Gustavo Arribas est visé par une enquête.

Au Pérou, une commission parlementaire a convoqué les ex-présidents Ollanta Humala et Alejandro Toledo.

Au Panama, le frère et le fils de l’ancien président Ricardo Martinelli ainsi qu’une dizaine de chefs d’entreprise sont dans le collimateur de la justice.

En Colombie, l’ex-ministre adjoint des Transports Gabriel Garcia et l’ancien sénateur Otto Bula ont été arrêtés. Des perquisitions ont été menées dans les bureaux du groupe de plusieurs pays.

Au Mozambique, les enquêteurs cherchent à identifier le responsable ayant touché 900.000 dollars pour autoriser la construction d’un aéroport à Nacala (nord).

  • Une fronde populaire -

Après deux semaines de violentes manifestations au Pérou, le péage d’une autoroute du nord de Lima construite par Odebrecht a été supprimé.

Des dizaines de milliers de personnes ont défilé le 22 janvier à Saint-Domingue pour réclamer la fin de l’impunité des fonctionnaires dominicains et des dirigeants locaux d’Odebrecht.

  • Odebrecht sanctionné -

Plusieurs pays dont l’Equateur, le Panama et la République dominicaine ont écarté Odebrecht des futurs appels d’offres ou interdit la signature de contrats avec lui.

L’entreprise a accepté de payer 3,5 milliards de dollars d’amende au Brésil, aux États-Unis et en Suisse, et de verser des indemnités de 59 millions de dollars au Panama et 189 millions à la République dominicaine.

Odebrecht, avec un chiffre d’affaires de 39,119 milliards de dollars en 2015 selon les derniers résultats publiés, joue désormais sa survie.

Le groupe a mis en vente pour 3,8 milliards de dollars d’actifs et s’est séparé de 60.000 employés depuis 2015, selon Bloomberg, l’entreprise confirmant pour sa part à l’AFP 40.000 départs entre fin 2014 et fin 2015.

Auteur : Par AFP

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