Niger : où est passé l’argent de l’« uraniumgate » ?

Dimanche 16 avril 2017

Enquête

Niger : où est passé l’argent de l’« uraniumgate » ?

Dans cette obscure affaire de vente d’uranium, le groupe français Areva dit avoir perdu 18 millions de dollars et l’Etat nigérien affirme en avoir gagné 800 000…

Par Christophe Châtelot

LE MONDE Le 07.04.2017 à 10h57 • Mis à jour le 12.04.2017 à 16h24

Il y a là, réunis autour d’une transaction financière qui sème le doute, tous les éléments d’un thriller politico-financier. On y retrouve le géant français du nucléaire Areva, un nouveau gouvernement, sans le sou, d’une ancienne colonie française en Afrique, des intermédiaires russe et libanais avec des comptes bancaires dans les Emirats arabes unis et des centaines de millions de dollars qui doivent changer de mains, lors d’une opération qui, finalement, n’aboutira pas.

Les journalistes nigériens l’appellent l’« uraniumgate ». A Niamey, une plainte contre X a été déposée par des organisations de la société civile. Une commission parlementaire enquête, de même que des juges parisiens, dans l’espoir de faire la clarté sur cette affaire opaque.

Le scandale a éclaté le 16 février, avec la publication dans l’hebdomadaire nigérien Le Courrier de documents portant sur la vente à l’automne 2011, pour 320 millions de dollars (environ 240 millions d’euros à l’époque), « d’une très forte quantité d’uranium ». Une transaction portée par Areva, mais dans laquelle apparaît la Société du patrimoine des mines du Niger (Sopamin), contrôlée par l’Etat nigérien, lequel a été immédiatement soupçonné par l’opposition et une partie de la presse nigériennes d’avoir partiellement détourné cette somme.

Des intermédiaires russe et libanais

Le Courrier avait alors détaillé le circuit tortueux de cette transaction : « Areva UG [filiale commerciale du groupe Areva] avait vendu une très forte quantité d’uranium à Energo Alyans, une société de distribution russe qui ne s’intéressait pas au commerce d’uranium ou au négoce de matières premières. Le 24 novembre [2011], la société Energo Alyans a vendu cet uranium à la société Optima Energy Offshore SAL, au Liban. Les deux ventes ont été notifiées à la société Areva. (…) Un virement bancaire de 319 millions de dollars (…) a été fait le 12 décembre 2011, du compte de Sopamin, logé chez BNP Paribas, à Paris, au compte d’Optima, à Dubaï. »

Le groupe français n’en conteste pas la véracité. « Il s’agissait d’une opération de trading dans le cadre d’une offre intégrée », nous confirme Christophe Neugnot, porte-parole d’Areva. En clair, le groupe français était, à l’époque, en contact avec un opérateur intéressé par l’achat de centrales nucléaires. « Dans ce genre de projet, l’opérateur veut de la visibilité et nous demande de sécuriser son approvisionnement futur en uranium », explique M. Neugnot. D’où cette opération de trading par laquelle Areva met une option sur l’achat de 3 000 tonnes d’uranium. Lire la suite.

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