Frégates : les confessions du général Imbot

Samedi 3 juin 2017

Frégates : les confessions du général Imbot.

Faits divers|Laurent Valdiguié|18 juin 2002, 0h00|0

Le général René Imbot, ancien patron des services secrets français, a révélé au juge Van Ruymbeke la mission de renseignement sur la vente des frégates de Taïwan effectuée par son fils Thierry. Ce dernier est décédé à Paris dans des conditions suspectes…

« MON fils savait beaucoup de choses sur les commissions occultes. » Le général René Imbot, ancien patron des services secrets français, a été entendu la semaine dernière comme témoin par le juge Renaud Van Ruymbeke dans le cadre de l’enquête sur la vente des frégates de Taïwan. Agé de 77 ans, le vieux général, ancien légionnaire, patron de la « Piscine » de 1985 à 1987, a révélé au magistrat que son fils Thierry, mort dans des conditions suspectes à l’automne 2000, chutant du quatrième étage de son immeuble, lui avait fait des confidences avant son décès. Thierry Imbot avait notamment raconté à son père comment le contrat des frégates de Taïwan avait permis à certains, « en France », de se constituer de véritables « fortunes ».

En mission pour la DGSE

Pour le général Imbot, il ne fait aucun doute que son fils Thierry, tombé du quatrième étage d’un immeuble parisien, détenait des informations sensibles dans l’affaire des frégates. Autre élément nouveau, René Imbot a révélé au juge Van Ruymbeke que son fils, le lendemain de sa mort, avait rendez-vous avec un mystérieux journaliste. Un « rendez-vous » que le magistrat cherche désormais à éclaircir. Enfin, le général a confié au juge que son fils Thierry, lorsqu’il a été envoyé en 1991 à Taïwan, sous couverture officielle d’attaché commercial auprès de la délégation française, était bien en mission pour la DGSE, les services secrets français, avec pour ordre d’enquêter sur les marchés d’armement dans l’île.

Thierry Imbot arrive à Taïwan en 1991. La vente des frégates de type Lafayette, assemblées par la DCN et équipées par Thomson, vient d’être signée dans des conditions diplomatiques laborieuses à cause de l’hostilité de la Chine. Thomson, après un refus de l’Elysée, n’a pas hésité à faire intervenir « le réseau Sirven », dans le but semble-t-il d’intervenir auprès de Roland Dumas, ministre des Affaires étrangères de François Mitterrand. C’est ce contrat top secret de 160 MF que Thomson refusera de payer qui donnera lieu, près de dix ans plus tard, à l’affaire Deviers-Joncour. S’estimant victime d’une « tentative d’escroquerie », Thomson déposera plainte en 1999 contre Alfred Sirven et l’ancienne amie de Roland Dumas. Mais en lançant les juges sur cette piste, le géant français de l’armement se retrouve aujourd’hui en première ligne. Désormais, le juge Van Ruymbeke et Dominique de Talancé enquêtent sur toutes les commissions et se heurtent en France au mur du « secret défense ». Jusque-là, les juges ont pu obtenir le contrat principal des frégates mais se voient encore interdire l’accès aux contrats annexes qui détaillent les montants de toutes les commissions. La justice suisse, de son côté, a mis la main sur les comptes d’un intermédiaire utilisé par Thomson, Andrew Wang. Ses comptes bancaires ont vu passer 500 millions de dollars. Largement de quoi alimenter les « fortunes » dont Thierry Imbot avait parlé à son père. Lire la suite.

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