Qui a tué Samora Machel ?

Mardi 22 août 2017

Le Mozambique hanté par l’assassinat de son premier président

Qui a tué Samora Machel ?

Alors que le Mozambique, secoué par des scandales, fragilisé par la chute du prix des matières premières, traverse l’une des plus graves crises de son histoire, la mort mystérieuse du président Samora Machel, survenue en 1986, hante le débat public. Avec le temps, les langues se délient ; la vérité commence à émerger. Et un faisceau d’indices désigne le gouvernement d’apartheid de l’Afrique du Sud.

par Augusta Conchiglia

Le 19 octobre 1986, le premier président du Mozambique indépendant, Samora Machel, 53 ans, meurt dans un accident d’avion sur le flanc de la colline de Mbuzini, dans le nord-est de l’Afrique du Sud. Il revenait, à bord d’un Tupolev 134A, de Mbala, dans le nord de la Zambie, où il avait participé à un sommet régional. Sur les trente-trois passagers — le président, son entourage et l’équipage soviétique —, neuf ont survécu.

Presque trente et un ans plus tard, les causes de cet accident demeurent mystérieuses. La version sud-africaine, qui pointe des erreurs commises par les pilotes, domine dans les chancelleries occidentales. Mais pour Moscou et Maputo, alors alliés, l’avion aurait été dévié de sa route par le signal d’une balise VOR (pour very high frequency omni-directional range). Celle-ci émettait sur les mêmes fréquences que l’aéroport de Maputo, opportunément plongé dans le noir ce soir-là.

Immédiatement, l’URSS et le Mozambique exigent une enquête sur place. Membre, avec eux, d’une commission tripartite constituée après le désastre, l’Afrique du Sud tergiverse. Sourde à leurs protestations et à celles des consultants de l’Organisation de l’aviation civile internationale, elle ne délivre les boîtes noires qu’un mois après l’accident.

Les documents déclassifiés par la France à l’occasion du trentième anniversaire du crash, en 2016, dédouanent le pays de l’apartheid. Ils révèlent surtout le dilettantisme de la diplomatie hexagonale dans ce dossier. Un télégramme du 13 juillet 1987, signé de l’ambassadeur français à Maputo Gérard Cros, sous-entend, contre toute évidence, une négligence du président : « Machel avait été mis en garde contre l’obsolescence des appareils et les déficiences des procédures de pilotage des Soviétiques. »

Ces deux accusations ne figurent pas dans le rapport sud-africain publié le 9 juillet 1987 sous la direction du juge Cecil Margo. L’ancien officier de l’armée de l’air sud-africaine savait que le Tupolev 134A avait été construit en 1980 et équipé des instruments (…)

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