Le Royaume-Uni post-Brexit va-t-il devenir le plus grand paradis fiscal du monde ?

Lundi 17 septembre 2018

Le Royaume-Uni post-Brexit va-t-il devenir le plus grand paradis fiscal du monde ?

DISSENSUS. Le bras droit de Theresa May, David Lidington, et le journaliste Marc Roche livrent leurs visions respectives à « l’Obs ».

Par Sophie Fay et Baptiste Legrand Publié le 16 septembre 2018 à 09h54

Extraits de l’article :

Paradis fiscal

A quoi ressemblera le Royaume-Uni post-Brexit ? A un gigantesque paradis fiscal ?

David Lidington : Nous avons apporté des garanties très claires avec le plan Chequers [du nom de la ville où s’est tenu un séminaire du gouvernement May, NDLR], sur des questions telles que les standards sociaux et les garanties environnementales. Je crois que cela peut rassurer nos partenaires européens. D’ailleurs, ce sont des normes sociales et environnementales que les Britanniques veulent pour eux-mêmes.

Quant aux services financiers, nous privilégions un système d’équivalence renforcée […]. Nous travaillons à assurer la plus haute garantie possible pour protéger nos propres consommateurs.

Je peux même citer des exemples qui montrent que nous sommes allés plus loin que les normes européennes. Concernant les exigences de capitalisation des banques, l’UE a convenu d’un ensemble de normes minimales. Nous avons tenu à renforcer les exigences de fonds propres, car nous voulions que les contribuables britanniques soient pleinement protégés du risque que représentent les banques d’investissement.

Marc Roche : Le Royaume-Uni est déjà un paradis fiscal ! La preuve : Roman Abramovitch, l’oligarque russe, peut vendre le club de Chelsea qu’il a acheté avec de l’argent noir tiré de la spoliation de l’URSS sans qu’on lui pose aucune question. Avec son réseau de zones offshore dans les territoires d’outre-mer britanniques et les anciennes colonies de la Couronne, c’est déjà le plus gros paradis fiscal et la City fait ses vaches grasses du négoce et du traitement des fonds rapatriés de ces zones. Un tiers des paradis fiscaux au monde sont britanniques.

Qu’est-ce qui va changer avec le Brexit ? Débarrassée des réglementations européennes – mais pas des réglementations internationales de l’OCDE, du G20, de la Banque des règlements internationaux –, la place de Londres ne peut que prospérer. Les limitations des bonus des banquiers vont être levées. Il y aura peu de transferts d’activité à Paris et à Francfort. Aucune banque, à part HSBC à Paris, n’a délocalisé énormément d’emplois. On parle de dizaines, de centaines au plus. Et, surtout, les pays émergents, en particulier la Chine, vont se sentir très à l’aise dans le Royaume-Uni post-Brexit. Londres deviendra la place financière et le cheval de Troie des fonds chinois. Depuis David Cameron en 2010, le Royaume-Uni joue la carte chinoise. C’est le seul pays qui vend son nucléaire à la Chine. […] Le Royaume-Uni accueille depuis 2010 les banques chinoises en court-circuitant le contrôle prudentiel de la Banque d’Angleterre, à tel point que « le Financial Times » s’est ému des risques systémiques que cela pouvait créer. La City est le seul vrai centre européen participant à l’internationalisation de la devise chinoise, le yuan. Et Londres accorde à tire-larigot des passeports dorés à tous les riches Chinois qui veulent s’installer au Royaume-Uni sans poser aucune question sur l’origine des fonds. Lire la suite.

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