« Biens mal acquis » : un avocat parisien de feu Omar Bongo mis en examen

Lundi 10 février 2020

Afrique Gabon

« Biens mal acquis » : un avocat parisien de feu Omar Bongo mis en examen

Jean-François Meyer, conseil du président gabonais durant près de vingt ans, est poursuivi pour « complicité de blanchiment de détournements de fonds publics et de corruption ».

Par Simon Piel et Joan Tilouine Publié aujourd’hui à 17h10, mis à jour à 17h15

Dans le petit milieu feutré des robes noires parisiennes spécialistes des dossiers franco-africains, Jean-François Meyer est une figure discrète et controversée. Un temps avocat de l’Etat du Sénégal, de celui du Tchad et du Mali, il a aussi facilité l’achat d’un avion et d’œuvres d’art pour l’actuel vice-président de Guinée équatoriale, Teodorin Obiang, premier condamné dans l’affaire dite des « biens mal acquis ». Mais c’est en tant que conseil, durant dix-neuf ans, de l’ancien président gabonais (1967-2009), Omar Bongo, défunt pilier de la « Françafrique », que Me Meyer a outrepassé ses fonctions, selon les enquêteurs français.

Dans ce dossier tentaculaire, l’avocat de 63 ans est le dernier « facilitateur » à avoir été mis en examen le 22 janvier pour « complicité de blanchiment de tout crime et délit (notamment des délits de détournements de fonds publics et de corruption) » et « recel de détournement de fonds publics et recel de corruption », selon les informations du Monde.

Un compte professionnel au service des Bongo

Pour le compte de la famille Bongo, l’avocat est soupçonné d’avoir facilité des acquisitions de biens immobiliers parisiens fastueux et d’avoir opacifié des fonds probablement publics. Pour ce faire, Me Meyer mettait au service de son client son compte bancaire professionnel à la BNP Paribas qui fut crédité, entre janvier 2006 et novembre 2007, de près de 7 millions d’euros par l’Etat gabonais. Selon la cellule de renseignement financier, Tracfin, au moins 2,3 millions d’euros de dépenses effectuées depuis ce compte n’ont aucune justification professionnelle. « Le fait que l’ensemble de ces sommes transite par le compte professionnel de Me Meyer semble singulier », notent les limiers de Tracfin.

Me Meyer apparaît comme un pourvoyeur de services financiers jouant même le « banquier » informel, selon les enquêteurs. En juin 2004, il s’illustre ainsi comme l’un des payeurs, à hauteur de 350 000 euros, d’un appartement dans le XVIe arrondissement. Or le bien est en réalité acheté par Omar Bongo pour l’un de ses fils, Ben Omar. Me Meyer n’est qu’un prête-nom soupçonné d’avoir servi à « masquer le financeur réel et l’origine frauduleuse des fonds employés à cet effet, et ce sans aucun lien avec l’exercice de la profession d’avocats », comme le souligne le juge d’instruction Dominique Blanc.

Me Meyer, dont le cabinet a été perquisitionné en juin 2011 dans le cadre de l’enquête, se chargeait également de produire des attestations sur l’origine des fonds gabonais, pourtant douteux, permettant à Omar Bongo d’assouvir sa frénésie d’acquisitions immobilières. L’avocat s’occupait ensuite de régler les charges à la copropriété pour des biens appartenant, à titre personnel, au président dont il est le représentant fiscal. Lire la suite.

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