BlackRock, gourou de la finance qui murmure à l’oreille des puissants

Jeudi 9 juillet 2020

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BlackRock, gourou de la finance qui murmure à l’oreille des puissants

La médiatrice de l’Union européenne vient d’ouvrir une enquête sur une mission attribuée par la Commission au gestionnaire d’actifs américain, après la plainte d’ONG et de 80 eurodéputés

Par Isabelle Chaperon Publié aujourd’hui à 02h34, mis à jour à 18h46

Il y a toujours eu un « Satan de la finance », un symbole capitaliste voué aux gémonies par les politiques et l’opinion publique. Après la crise des subprimes en 2007, la banque Goldman Sachs avait endossé ce rôle de « pieuvre » nuisible. Depuis peu, en dépit des efforts de son PDG Larry Fink pour apparaître comme un des avocats d’un capitalisme réformé, BlackRock a pris le relais.

Lundi 6 juillet, la médiatrice de l’Union européenne, Emily O’Reilly, a ouvert une enquête sur une mission attribuée par la Commission européenne au gestionnaire d’actifs américain, après la plainte d’ONG et de 80 eurodéputés. En France, les locaux parisiens du financier avaient été envahis en janvier par des « gilets jaunes » et des salariés des transports publics accusant la firme d’avoir inspiré la réforme des retraites, puis à nouveau en février par une centaine de militants d’Extinction Rebellion, pour dénoncer « l’ennemi numéro un » de l’écologie.

Avec 6 500 milliards de dollars (au 31 mars 2020) – soit 5 750 milliards d’euros – confiés par ses clients, la société de gestion créée en 1988 par Larry Fink est devenue numéro un mondial du secteur. Mais ce montant vertigineux ne suffit pas à expliquer cette exposition médiatique : son rival Vanguard, avec ses 6 200 milliards de dollars d’actifs sous gestion (au 31 janvier 2020), reste sous le radar de l’opinion publique. BlackRock est-il trop puissant ? Quelles sont les sources de son influence ?

Stratégie payante

BlackRock n’est ni un fonds de pension ni un fonds spéculatif. Il s’agit d’une société cotée, employant 16 000 salariés, dont le métier consiste à collecter de l’argent auprès de fonds de pension, banques ou assureurs pour l’investir sur les marchés financiers. Point essentiel : 66 % de ces placements suivent des indices, ce qu’on appelle la gestion « passive ». Si Teleperformance remplace Sodexo dans le CAC 40, le gérant passif vend ses actions Sodexo et achète des titres Teleperformance. La marge de manœuvre de cette gestion à bas coûts s’avère donc limitée.

Son PDG Larry Fink est, pourtant, reçu dans le monde entier par les chefs d’Etat désireux de promouvoir leur politique économique et d’écouter ses analyses. Au Mexique, c’est le président Andrés Manuel Lopez Obrador qui se vante de bien connaître le financier ! Ces accès « premium » ne tombent pas du ciel : de Washington à Singapour, BlackRock a soigneusement recruté dans les cercles du pouvoir. Lire la suite.

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