Pas d’entraide suisse à la Russie dans l’affaire Yukos

Vendredi 24 août 2007 — Dernier ajout mardi 10 octobre 2017

SUISSE : Pas d’entraide suisse à la Russie dans l’affaire Yukos

Date de parution : Vendredi 24 août 2007

Auteur : Denis Masmejan

TRIBUNAL FEDERAL. La justice russe est manipulée par le pouvoir, estiment les juges.

La Suisse n’accordera finalement pas d’entraide judiciaire à la Russie dans l’affaire Yukos. Dans une série de décisions rendues publiques jeudi, le Tribunal fédéral a désavoué, cette fois définitivement, le Ministère public de la Confédération. Le caractère manifestement politique des poursuites déclenchées par le Parquet moscovite, de même que « les violations des garanties relatives aux droits de l’homme et de la défense qui ont apparemment été commises tout au long de la procédure » s’opposent à une coopération judiciaire avec les autorités russes, ont estimé les juges.

Le Tribunal fédéral a admis les recours déposés par les anciens dirigeants du groupe pétrolier, Mikhail Khodorkovski et Platon Lebedev, ainsi que par des entités qui leur étaient liées et qui détenaient des comptes en Suisse. Le Ministère public fédéral doit encore statuer sur les 200 millions de francs bloqués en Suisse, qui devraient logiquement être libérés prochainement.

S’agissant de la transmission d’informations bancaires relatives à des entités qui ne sont pas elles-mêmes objet de la procédure étrangère, « c’est la première fois que le Tribunal fédéral s’y oppose pour des raisons tenant au respect de l’Etat de droit », réagit le défenseur de plusieurs de sociétés concernées, Me Patrick Hunziker, de l’étude genevoise de Preux.

Une mise au pas

Une appréciation d’une telle sévérité sur le fonctionnement des institutions d’un Etat étranger est en effet exceptionnelle de la part du Tribunal fédéral. Mais son jugement est corroboré par des rapports du Conseil de l’Europe, qui s’est vivement inquiété des violations des droits de l’homme commises par le pouvoir russe dans cette affaire. Selon les juges, les autorités suisses ne peuvent prêter leur concours à des procédures dont tout laisse penser qu’elles ont pour raison essentielle la volonté des dirigeants russes de mettre au pas les « oligarques ».

Une première fois, en 2006, le Tribunal fédéral avait mis en garde le Ministère public de la Confédération et l’avait contraint à demander des précisions à Moscou. Après avoir obtenu réponse, le Parquet fédéral avait cru l’entraide néanmoins possible. Diverses interventions parlementaires, à Berne, s’étaient préoccupées de l’activisme des services de l’ancien procureur général Valentin Roschacher dans cette affaire, accusés d’être aveugles, en l’occurrence, à l’utilisation politique de la justice.

Arrêts 1A.15, 16, 27 et 29/2007 du 13 août 2007.

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