Geste de révolte sans précédent des entrepreneurs siciliens contre la mafia

Dimanche 2 septembre 2007 — Dernier ajout mercredi 5 septembre 2007

02/09/2007 13:58

ROME (AFP) - Geste de révolte sans précédent des entrepreneurs siciliens contre la mafia

Confrontée à une forte hausse du racket des entreprises de Sicile par la mafia, l’association des entrepreneurs siciliens a décidé de réagir en promettant l’expulsion de ses rangs de tous ceux qui accepteraient à l’avenir de payer le « pizzo », l’impôt mafieux.

Cette décision sans précédent a été prise à l’unanimité de la Cofindustria (Confédération patronale) de Sicile réunie samedi en assemblée extraordinaire à Caltanissetta dans le centre de l’île, rapporte dimanche la presse italienne.

L’initiative de cette révolte anti-mafia est venue d’Andrea Vecchio, le président de l’Association des entrepreneurs du bâtiment de Catane qui a reçu quatre menaces de mort en quatre jours à son retour de vacances pour ne pas avoir payé le « pizzo » et dont les engins de chantier ont été attaqués à deux reprises durant cette période.

M.Vecchio qui vit désormais avec sa famille sous la protection de la police, a écrit au président de la République Georgio Napolitano une lettre dans laquelle il affirme : « On ne peut vivre ainsi. Ce n’est pas seulement nous, les entrepreneurs, qui sommes attaqués, mais l’Etat ».

« Au nom de tous les entrepreneurs siciliens (…) nous voulons vivre comme les citoyens d’un pays normal, rien de plus », affirme-t-il.

Le vice-président national de la Cofindustria, Ettore Artioli, lui-même présent samedi à Caltanissetta a pour sa part réclamé l’intervention de l’armée dans l’île en Sicile pour combattre la mafia.

Selon M.Artioli toute la puissante Cofindustria d’Italie soutient « le combat pour la légalité » de sa branche sicilienne.

De nouveaux dirigeants plus jeunes ont été désignés à la tête des associations patronales les plus à risques, notamment à Agrigente, Catane et Caltanissetta et plusieurs centaines d’entreprises fantômes qui payaient leur cotisation uniquement pour noyauter les Chambres de Commerce ou les organes associatifs territoriaux ont été exclus des rangs patronaux, a affirmé M.Artioli.

Les sommes rackettées chaque année par la mafia sont évaluées à près de 10 milliards d’euros par an par l’association des entrepreneurs siciliens et peu d’activités économiques échappent à « la Pieuvre ».

Une étude sur « les coûts de l’illégalité » de l’Université de Palerme chiffre à 60 euros par mois en moyenne les sommes exigées par la mafia des petits vendeurs et marchands ambulants de l’île.

Le « pizzo » grimpe à 457 euros par mois pour les commerces de détail et à 578 euros par mois pour les auberges et restaurants.

Chaque chantier est taxé entre 2 et 4% de sa valeur par la mafia tandis que les sociétés de construction et d’entretien des routes doivent verser une moyenne de 17.000 euros par chantier, selon cette étude financée par la Fondation Chinnici citée dimanche par le quotidien la Repubblica.

D’Amman, en Jordanie, où il effectuait une visite le président du Conseil Romano Prodi a salué samedi soir le « bel exemple » de civisme donné par la Cofindustria de Sicile en estimant « que la lutte contre la mafia ne serait gagnée qu’avec une réaction de la société civile ».

M.Prodi a refusé en revanche d’envisager de déployer l’armée dans l’île en déclarant qu’il pensait « plus efficace la réaction de la société civile ».

L’armée italienne n’a plus été déployée en Sicile contre la mafia depuis 1992 à l’époque des « Vêpres siciliennes » quand la mafia avait assassiné les juges Giovanni Falcone et Paolo Borsellino lors de deux attaques spectaculaires qui avaient choqué toute l’Italie.

© AFP

Publié avec l’aimable autorisation de l’Agence France Presse.

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