Un « tribunal » pour les journalistes assassinés ouvre à La Haye

Mardi 2 novembre 2021

Un « tribunal » pour les journalistes assassinés ouvre à La Haye

2 nov. 2021 Par Agence France-Presse

  • Mediapart.fr

Un « tribunal populaire » chargé d’enquêter sur des meurtres de journalistes et demander des comptes aux gouvernements jugés responsables de ces crimes s’est ouvert mardi à La Haye, dénonçant la violence en hausse contre cette profession dans le monde entier.

Un « tribunal populaire » chargé d’enquêter sur des meurtres de journalistes et demander des comptes aux gouvernements jugés responsables de ces crimes s’est ouvert mardi à La Haye, dénonçant la violence en hausse contre cette profession dans le monde entier.

Composé de juristes internationaux, ce « tribunal » tiendra des audiences pendant six mois dans trois affaires retentissantes, l’assassinat en 2009 de Lasantha Wickrematunge au Sri Lanka, celui de Miguel Ángel López Velasco au Mexique en 2011 et celui de Nabil Al-Sharbaji en Syrie en 2015.

L’instance prend la forme d’une assemblée délibérative où des personnalités dénoncent sous une forme juridique des actes qu’elles jugent répréhensibles vis-à-vis de journalistes, en particulier par rapport au droit international. Leurs avis seront ensuite remis aux autorités concernées.

La Philippine Maria Ressa, lauréate du prix Nobel de la paix, était l’une des premières à témoigner, mettant en garde contre « l’armement des réseaux sociaux » contre les journalistes et autres voix critiques.

Mme Ressa a déclaré par visioconférence qu’elle et son journal d’investigation Rappler avaient été la cible de poursuites judiciaires et de menaces à la suite de reportages sur la « guerre contre la drogue » du président philippin Rodrigo Duterte.

Parmi les témoins clés figure par ailleurs Hatice Cengiz, universitaire et fiancée du journaliste saoudien Jamal Khashoggi, assassiné en 2018.

« Avant, les journalistes étaient ciblés par des individus, maintenant ils sont ciblés par des gouvernements », a déclaré Mme Cengiz lundi lors d’une conférence de presse à La Haye.

Elle participe au « tribunal populaire », situé dans une église du XVIIe siècle à La Haye, pour « rappeler au monde ce qui est arrivé à Jamal et pourquoi nous n’avons pas obtenu justice jusqu’à présent », a-t-elle ajouté.

Le « tribunal » a été créé par trois grandes organisations de défense de la liberté de la presse : Reporters sans frontières (RSF), basé à Paris, Free Press Unlimited (FPU), qui a son siège à Amsterdam, et le Comité pour la protection des journalistes (CPJ), basé à New York.

Depuis 1992, plus de 1.400 journalistes ont été tués, et dans huit cas sur dix où un journaliste est assassiné, les meurtriers ne sont pas appréhendés, selon RSF.

Les libertés des médias ont été encore plus compromises ces dernières années par des dirigeants populistes, dont l’ancien président américain Donald Trump, a déclaré Helena Kennedy, une célèbre avocate britannique qui conseille le « tribunal ».

« Le journalisme consiste à dire la vérité. C’est ce dont les gouvernements populistes et autoritaires ont le plus peur », a-t-elle ajouté par visioconférence.

Le tribunal veut montrer qu’il est possible de trouver de nouvelles preuves dans les affaires de meurtres de journalistes, même lorsque les États ne peuvent ou ne veulent pas, a déclaré le directeur du FPU, Leon Willems.

« Lorsqu’un journaliste est tué, lorsque nous laissons cela se produire, nous tuons des histoires. Nous tuons des histoires qui sont importantes, qui révèlent des actes répréhensibles », a-t-il poursuivi.

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