Berne met sous pression l’industrie extractive

Dimanche 12 novembre 2017

Berne met sous pression l’industrie extractive

Paradise Papers Simonetta Sommaruga brandit la menace d’une régulation fédérale si la branche est incapable de s’auto-réguler.

La ministre de la Justice Simonetta Sommaruga lance un avertissement sévère à l’industrie des matières premières éclaboussée par les Paradise Papers. Dans un entretien avec Le Matin Dimanche et la SonntagsZeitung, elle brandit la menace d’une régulation fédérale.

« Si l’économie ne parvient pas à se tenir à ses propres règles, il faudra des règles étatiques », affirme la conseillère fédérale. Jusqu’ici les engagements de l’industrie extractive, en ce qui concerne la corruption ou la durabilité « ne sont pas vraiment convaincants ».

Une disposition anticorruption concoctée par le Conseil fédéral est actuellement examinée par le Parlement. Elle obligerait les entreprises du secteur de l’extraction à publier les versements à un gouvernement ou une entreprise publique d’un montant supérieur ou égal à 100’000 francs par exercice, selon le projet de révision du droit de la société anonyme.

Une plus grande transparence permettrait à la population de connaître les sommes que leur gouvernement encaisse grâce aux matières premières, illustre la conseillère fédérale. Elle-même a vu lors de ses voyages en Afrique le dénuement des populations de certains pays comme la Guinée ou le Niger, champions de gisements de bauxite ou d’uranium.

Réputation suisse en jeu

« Le projet anticorruption au Parlement est un premier pas », précise la conseillère fédérale. Il s’inspire des nouvelles directives européennes qui obligent le secteur à publier des rapports détaillés. « Le Conseil fédéral suit de très près la mise en pratique de ces nouvelles directives », poursuit-elle.

La Suisse a jusqu’à présent misé sur la bonne volonté des entreprises à s’autoréguler. Mais les investigations liées aux Paradise Papers mettent la politique sous pression, souligne Simonetta Sommaruga. La socialiste met en garde contre le risque important d’entacher la réputation suisse.

« Il serait très dommageable pour notre pays de se trouver à nouveau sous les feux des critiques en raison de certaines pratiques commerciales » mais aussi mauvais de négocier sous pression de l’étranger.

La corruption, un délit pénal

Car pour la Bernoise, il ne s’agit pas seulement de morale, mais de loi à respecter. « La corruption de fonctionnaires étrangers est interdite », rappelle la ministre. Il s’agit d’infractions pénales en Suisse et les intermédiaires financiers sont tenus d’annoncer toute transaction suspecte au Bureau de communication en matière de blanchiment d’argent.

« Plus d’un quart des annonces qui ont été transmises aux autorités de poursuite en 2016 concernait des soupçons de corruption à l’étranger. L’année dernière il s’agissait de 472 annonces », selon la cheffe du DFJP, précisant qu’une part importante concernait le secteur des matières premières.

Monika Ribar

Certains pays exigent que ce devoir d’annonce ne se limite pas aux banques mais vienne des entreprises elles-mêmes. Pour la ministre, cette proposition figure dans l’initiative pour des multinationales responsables. L’initiative va trop loin, mais il y a effectivement nécessité d’agir dans ce domaine, concède-t-elle.

Interrogée sur la mention de Monika Ribar, présidente du conseil d’administration des CFF, dans les Paradise Papers, Simonetta Sommaruga rappelle que pour toute nomination à la tête d’une entreprise de la Confédération, les mandats d’administration doivent être déclarés. « Je pars du principe que cela a été fait dans ce cas-là aussi ».

(ats/nxp)

Créé : 12.11.2017, 11h41

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