« Il est important d’avoir un cadre international pour réguler les cryptomonnaies »

Vendredi 3 décembre 2021

« Il est important d’avoir un cadre international pour réguler les cryptomonnaies »

Tribune

Karel Lannoo Economiste

L’économiste Karel Lannoo juge, dans une tribune au « Monde », que l’Union européenne devrait considérer les cryptomonnaies comme des instruments financiers, et non comme une catégorie distincte d’actifs.

Publié aujourd’hui à 11h59

Tribune. Les cryptomonnaies seront bientôt soumises à un système de supervision dans l’Union européenne (UE) : la Commission de Bruxelles se prépare, en effet, à proposer une directive sur les marchés de crypto-actifs, dite « directive MiCA ». Selon les propositions de la Commission, seules les cryptomonnaies autorisées dans l’UE pourront être vendues. Une cryptomonnaie pouvant prendre différentes formes, elles-mêmes soumises à différentes formes de supervision, le sujet est complexe à comprendre pour les consommateurs, et il est tout aussi difficile à traiter pour les superviseurs européens.

Déjà présentes depuis quelques années, les cryptomonnaies deviennent de plus en plus populaires, malgré le fait qu’elles ne soient soumises à aucune forme de surveillance. Il est difficile, voire impossible, pour un investisseur ou un utilisateur ordinaire de déterminer s’il s’agit d’une escroquerie à la Ponzi, de coquilles de blanchiment d’argent, de stablecoins (« monnaies stables ») bien conçues ou de véritables actifs numériques. On ignore également, en général, où elles sont basées, comment elles sont organisées et qui en est le gérant…

La Commission européenne est la première organisation internationale à proposer un cadre réglementaire spécifique. Certains membres de l’UE disposent déjà d’une législation spéciale pour les crypto-actifs et les cryptomonnaies, mais il n’existe aucun accord international à ce sujet. D’autres pays, comme les Etats-Unis ou Hongkong, appliquent la législation existante des valeurs mobilières. Cela conduit à un cadre très flou pour une innovation comme la cryptomonnaie. Un consommateur ne sait guère si une protection existe, surtout pour les transactions qui ont lieu en dehors de l’UE.

Grand point d’interrogation

Pour la Commission européenne, les cryptomonnaies fonctionnent sur la blockchain (sécurisation numérique) ou une technologie de registre distribué (DLT), et peuvent prendre trois formes, suivant un degré de surveillance correspondant : les tokens (gadgets virtuels), les stablecoins, composées de monnaies de réserve, et la monnaie numérique pure, qui offre toujours un taux de change fixe en monnaie forte. La monnaie numérique peut uniquement être émise par des banques ou des sociétés fintech qui disposent d’une licence existante, les stablecoins uniquement par ceux qui respectent des exigences minimales (très faibles) en matière de capital. Lire aussi Après plus de 600 millions de dollars volés, le monde de la cryptomonnaie s’interroge sur sa sécurité

Les cryptomonnaies non européennes, comme le diem ou le novi de Facebook, le bitcoin ou l’ethereum, devront s’enregistrer sous l’une de ces formes pour être admises sur le marché européen. Un système de reconnaissance mutuelle n’est pas prévu, car les réglementations sont trop différentes au niveau international. Le consommateur risque d’en faire les frais, car il ne verra aucune différence entre une crypto de l’UE et une crypto internationale, mais recevra quand même de la publicité sur les médias sociaux pour les cryptos non réglementées. Lire la suite.

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