LVMH s’empare des Echos

Mardi 6 novembre 2007

Lundi 05 Novembre 2007

LVMH s’empare des Echos

Par Nicolas MOSCOVICI

leJDD.fr

C’est fait. Après de longs mois de polémique, LVMH, le groupe de Bernard Arnault s’est approprié Les Echos. Un accord de cession a été signé lundi avec le groupe Pearson, propriétaire du titre économique. Cette annonce suit de quelques heures la décision du TGI de Paris, favorable à l’opération. Malgré les critiques, le groupe de luxe promet de respecter « l’indépendance éditoriale » des journalistes.

Le sort a joué un vilain tour ce lundi aux journalistes des Echos. Au moment où nombre d’entre eux défilaient en tête de cortège à Paris, derrière leur banderole « M. Arnault, l’indépendance, ce n’est pas du luxe », dans le cadre de la journée européenne de la liberté de la presse, LVMH parvenait enfin à s’emparer du titre économique tant convoité depuis de longs mois. Lundi, peu avant 20 heures, le communiqué fatidique tombe : « LVMH annonce avoir signé aujourd’hui avec le Groupe Pearson l’acquisition du Groupe Les Echos ». Quant au dernier recours des opposants à cette cession, dont une majorité de journalistes, il s’était éteint quelques heures plus tôt, devant le Tribunal de grande instance de Paris.

Le juge saisi avait en effet débouté en début de journée les représentants des salariés (comité d’entreprise et syndicats des Echos), engagés dans un bras de fer avec leur direction et qui s’opposaient à la clôture de la procédure de consultation sur le projet de vente. Leur objectif : entretenir la piste Fimalac, considérée par eux comme le repreneur idéal du groupe économique. En vain, même si les plaignants ont fait appel de la décision. Le tribunal n’a effectivement observé aucun obstacle majeur aux négociations exclusives nouées entre Pearson et LVMH. Lesquelles ont donc pu tranquillement se conclure un peu plus tard. La transaction tourne autour de 240 millions d’euros. En 2006, le groupe Les Echos, qui comprend le quotidien du même nom, mais aussi son site internet (lesechos.fr), le magazine Enjeux et d’autres services d’information financière spécialisés, a réalisé un chiffre d’affaires de 126 millions d’euros pour un résultat opérationnel de 10 millions d’euros. Un bilan qui le place en tête de la presse économique française. Devant La Tribune, son concurrent direct, détenu pour l’heure par… LVMH.

Les Echos absents des kiosques mardi

Cette situation inédite se trouve au cœur des angoisses des journalistes des Echos, mais également de La Tribune, légitimement inquiets de leur avenir. Si le communiqué publié par LVMH précise que la cession de ce dernier titre est bien à l’ordre du jour, la Société des Journalistes (SDJ) des Echos dénonce une inadmissible concentration. Interrogé par iTélé lundi soir, Vincent de Féligonde, le président de la SDJ des Echos relève que le fait pour LVMH de posséder les deux seuls quotidiens économiques français « n’est pas normal ». « Extrêmement déçu », il en appelle désormais « aux autorités de concurrence » afin qu’elles se saisissent du dossier. Une procédure qui deviendrait toutefois caduque lorsque LVMH se sera débarrassé de La Tribune. Opération qui, au vu de ces derniers événements, pourrait très prochainement entrer dans sa phase décisive. Un comité d’entreprise prévu le 8 novembre devrait d’ailleurs en dire un peu plus long sur la question.

L’autre ligne de fracture entre la SDJ des Echos et LVMH, laquelle a alimenté les quatre mois de bras de fer qui viennent de s’achever, concerne l’indépendance de la rédaction face à son nouveau propriétaire, l’un des plus puissants groupes économiques français, présent dans de nombreux secteurs d’activité. « Pearson était un propriétaire idéal, qui, en 18 ans, n’a jamais porté atteinte à notre indépendance », se souvient Vincent de Féligonde. « L’indépendance est la condition du succès », ajoute-t-il à l’adresse de sa nouvelle direction. Laquelle avait tenté d’apaiser les esprits en signalant dans son communiqué que « l’accord entre LVMH et Pearson comporte un ensemble de dispositions relatives à l’indépendance éditoriale ainsi que des engagements en matière d’emploi ». Un conseil de surveillance, comprenant trois administrateurs indépendants, ainsi qu’un comité d’indépendance éditoriale auraient été négociés entre LVMH et Pearson. Une précaution qui, dans l’immédiat, fait chou blanc. Mardi 6 novembre, le quotidien ne paraîtra pas en kiosques. Ainsi en a décidé lundi soir, à une écrasante majorité (162 voix pour, 12 voix contre et 7 votes blanc), l’assemblée générale des journalistes. Lesquels n’entendent donc pas rendre les armes.

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