Clearstream : une réprimande demandée pour le juge Van Ruymbeke

Jeudi 25 octobre 2007

Société

Clearstream : une réprimande demandée pour le juge Van Ruymbeke

AP | 25.10.2007 | 19:57

Le représentant du ministère de la Justice a demandé jeudi au Conseil supérieur de la magistrature (CSM) d’infliger une réprimande au juge d’instruction Renaud van Ruymbeke, mis en cause en marge de l’affaire Clearstream. Le juge Van Ruymbeke a estimé devant la formation disciplinaire du CSM, où de nombreux avocats et magistrats étaient venus le soutenir, avoir « été traîné dans la boue » dans cette affaire.

La décision a été mise en délibéré au 20 novembre à 14h.

Le CSM a été saisi en février par le précédent garde des Sceaux, Pascal Clément, sur la base du rapport de l’Inspection générale des services judiciaires (IGSJ) qui reproche trois fautes disciplinaires à ce magistrat emblématique de la lutte contre la corruption.

Le ministère reproche à M. Van Ruymbeke d’avoir rencontré hors procédure Jean-Louis Gergorin au printemps dans l’enquête sur les frégates de Taïwan, de ne pas avoir informé les juges chargés de l’affaire Clearstream l’identité du « corbeau » de son dossier et d’avoir communiqué pour avis à un tiers des pièces de son dossier.

Léonard Bernard de la Gâtinais, directeur des services judiciaires, a demandé au CSM d’abandonner le premier grief retenu contre le juge, aucun élément au dossier ne démontrant que M. Van Ruymbeke n’a pas dit la vérité. En revanche, le représentant du ministère public a considéré que le magistrat avait manqué à ses obligations de loyauté en ne donnant pas aux juges Jean-Marie d’Huy et Henri Pons l’identité du « corbeau » de son dossier. Il a également estimé que le juge avait manqué à son devoir de réserve en communiquant à un tiers des informations sur l’affaire.

« Il ne s’agit pas ici de sanctionner le comportement d’un magistrat habitué à quelques dérives. Il s’agit pour vous de dire jusqu’où un juge peut s’affranchir d’une certaine façon des règles qui s’imposeraient à tous les autres juges », a déclaré M. Bernard de la Gâtinais.

Devant le CSM, Renaud van Ruymbeke a expliqué qu’en 2004 son enquête sur les frégates de Taïwan était dans une impasse totale, bloquée par les refus de levée du secret-défense par les ministres de l’Economie successifs. M. Gergorin « n’était pas n’importe qui », a-t-il dit rappelant ses anciennes fonctions de maître de requêtes au Conseil d’Etat.

Le juge Van Ruymbeke va rencontrer à trois reprises M. Gergorin au cabinet de son avocat, pour se renseigner sur la véracité des menaces de mort dont il dit être l’objet, la pertinence de ses propos et tenter aussi de le faire témoigner sous X, comme la loi le permet. « Je ne pouvais pas le forcer à parler. Par la suite, ils ont décidé d’envoyer des lettres anonymes. C’est un choix. Ce n’est pas le mien », a-t-il dit.

Entre mai et octobre 2004, le juge va donc recevoir de façon « anonyme » plusieurs documents, dont un listing de la chambre de compensation luxembourgeoise Clearstream. Les investigations internationales qu’il diligentera montreront que les informations mentionnées dans les documents anonymes, dont le listing Clearstream indiquant que Nicolas Sarkozy était titulaire de comptes, sont fausses.

Le magistrat avait fait citer plusieurs témoins, dont des juges d’instruction et des avocats venus témoigner de sa « loyauté ». L’un de ses avocats, Me Philippe Lemaire, a rappelé que le président de la République, président de droit du CSM, était partie civile dans ce dossier. « Il semble nourrir une inimitié certaine à l’encontre de M. Van Ruymbeke qu’il a exprimé à plusieurs reprises, au mépris évident de la séparation des pouvoirs ».

La réprimande est la plus faible des sanctions que peut prononcer le CSM. L’avis sera mis en délibéré à la suite des plaidoiries de la défense.

© AP

Publié avec l’aimable autorisation de l’Associated Press.

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