« Le club parisien est le plus mal géré du monde »

Lundi 11 avril 2005 — Dernier ajout mardi 21 avril 2009

« Le club parisien est le plus mal géré du monde »

L’intermédiaire William Mac Kay bientôt entendu par le juge

C’est l’un des principaux intermédiaires du football européen. Né à Glasgow, William Mac Kay, Ecossais, catholique, une carrure de troisième ligne de rugby, est un des protagonistes de l’enquête judiciaire sur les transferts du Paris-Saint-Germain. Installé depuis sept ans à Monaco, il a accepté, pour la première fois, de s’expliquer sur les soupçons qui pèsent sur lui. Ami de Pape Diouf, l’ancien agent devenu président de l’Olympique de Marseille, il considère que l’affaire du PSG est d’abord le résultat d’une mauvaise gestion. Egratignant au passage les anciens dirigeants parisiens mais aussi Francis Graille, président en fonction aujourd’hui, et la plupart des agents français, il justifie les millions d’euros tirés en liquide de ses comptes par sa passion pour les casinos et ses douze chevaux de course. Une version que la justice tentera de vérifier. Propos recueillis par Eric Decouty [11 avril 2005]

LE FIGARO. - Vous êtes soupçonné d’avoir redistribué une part des sommes reçues lors des transferts du PSG. Comment réagissez-vous ?

William MAC KAY. - Tout d’abord, je ne suis pas agent de joueurs mais agent de football. Depuis dix ans que je fais ce métier, j’ai toujours été mandaté et payé par les clubs. Jamais par les joueurs. Ensuite, beaucoup pensent que je suis « incontournable » dans les transferts entre la France et l’Angleterre, et cela suscite pas mal de jalousie. Mais je n’ai rien à cacher, tout ce que j’ai fait est propre. Sachez qu’en Angleterre un agent ne reçoit pas sa commission directement du club qui le mandate. Elle est versée à la fédération qui ensuite la lui restitue. C’est une garantie de transparence.

Ce système, qui n’existe pas en France, n’empêche pas le versement de commissions à d’autres personnages ?

Je n’ai jamais versé le moindre euro à un entraîneur, à un dirigeant de club ou à un joueur. Mes comptes sont transparents, et c’est d’ailleurs pour cela que je les ai communiqués au juge.

Le magistrat a saisi vos comptes monégasques qui révèlent des retraits en espèces d’environ 6,5 millions d’euros entre 1999 et 2004. A quoi a servi cet argent ?

Je ne suis accusé de rien. Par conséquent, je n’ai rien à justifier, ni à vous ni au juge, je fais ce que j’entends de mon argent. Je peux toutefois vous confier que je suis joueur, dépensier et que j’adore les chevaux. Je possède une écurie que je fais courir. Voilà la principale explication de ces retraits.

Pourquoi avez-vous domicilié vos comptes à Monaco ?

Parce que j’habite à Monaco depuis sept ans pour des raisons strictement professionnelles et parce que le climat y est meilleur qu’à Glasgow. Vous autres Français pensez qu’un étranger qui habite Monaco est forcément un truand. C’est grotesque !

Parmi les transferts du PSG, vous avez notamment été l’agent d’Anelka lors de son départ à Manchester City en 2002. Dans quelles conditions s’est déroulée l’opération ?

Je n’étais pas l’agent d’Anelka. Mais un beau jour, alors que je me trouvais dans le bureau de Kevin Keegan, le manager de Manchester City, je reçois sur mon portable un appel de Gérard Houiller, entraîneur de Liverpool. A l’époque, Anelka était prêté à Liverpool par le PSG. Houiller me demande des informations sur un autre joueur et me confie qu’il entend se débarrasser d’Anelka. J’en glisse un mot à Keegan qui est intéressé. J’appelle ensuite le PSG, et Pierre Frelot (NDLR : directeur administratif et financier du PSG) m’assure que Liverpool va acheter Anelka. J’ai beau le prévenir que rien n’est acquis, il ne veut pas me croire. Il finit cependant par me signer un mandat pour que je discute avec Manchester City. Plus tard, comme prévu, Liverpool décide de se débarrasser d’Anelka. Grâce à moi, le PSG, qui n’avait pas recherché d’autre club et qui risquait de voir revenir Anelka, a pu le vendre à Manchester. J’ai touché une commission de 500 000 livres (750 000 euros) et j’ai fait économiser de l’argent au PSG. Ils devraient me donner la Légion d’honneur.

Ce transfert n’a donné lieu à aucune autre commission ?

J’ai été payé par le PSG. Les frères, les cousins et les avocats d’Anelka ont été rémunérés par Manchester.

Pourquoi ?

Lorsqu’il y a une poule aux œufs d’or, tout le monde est intéressé.

Des transferts ont-ils donné lieu à des malversations au PSG ?

Je ne le crois pas. Je pense, en revanche, que, si le PSG a des problèmes, c’est tout simplement parce que c’est le club le plus mal géré du monde.

Francis Graille ne vous a pas ménagé…

J’ai effectivement lu cela dans la presse. Nous avons eu un différend à l’occasion d’un transfert lorsqu’il dirigeait le club de Lille. Mais je vous fais remarquer que cette histoire ne l’a pas empêché de me signer des mandats lorsqu’il est arrivé à Paris…

Que pensez-vous des « affaires » qui agitent le football ?

Il y a beaucoup trop d’agents. C’est devenu un véritable marigot. En France, ils sont trois à être vraiment sérieux. La plupart travaillent comme des agents immobiliers. Alors, forcément, en Angleterre, où les clubs s’attendent à plus de professionnalisme, ça ne passe pas. Ces agents créent le désordre et la confusion et donnent l’image d’un football qui n’est pas propre.

© Le Figaro

Publié avec l’aimable autorisation du journal Le Figaro.

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Pour plus de précisions sur ces dossiers veuillez vous reporter aux rubriques suivantes :

1) l’interview de Denis Robert : le football est devenu une formidable machine à blanchir de l’argent ;

2) L’ouvrage de Denis Robert : « le milieu de terrain ».

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