« Pétrole contre nourriture » : retour dans le bourbier irakien

Lundi 21 janvier 2013

« Pétrole contre nourriture » : retour dans le bourbier irakien

Par Valerie de Senneville | 20/01 | 12:20

Le groupe Total, la société de trading Vitol ainsi que 18 autres personnes sont renvoyés lundi devant la 11e chambre correctionnelle de Paris dans le cadre de l’affaire « Pétrole contre nourriture ». Au terme de dix ans d’enquête, les dossiers noirs de l’embargo sur le pétrole irakien vont révéler leurs secrets.

Extraits de l’article mis en ligne sur le site du journal Les Echos :

Tout le monde aurait aimé oublier ces années sombres, ces années sales. Ce temps où l’Irak, pays riche de son pétrole tant convoité, était aux mains d’un despote et où la guerre avait laissé un peuple affamé. Mais la justice est une horloge que personne ne peut arrêter. Alors à partir de lundi et pendant un mois, Total et les 19 personnes renvoyées dans le dossier « Pétrole contre nourriture » vont devoir affronter le passé, des faits vieux de quinze ans. Parmi celles-ci, Charles Pasqua, le président de Total Christophe de Margerie, mais aussi des diplomates, des salariés et son lot « d’apporteurs d’affaires » poursuivies pour « trafic d’influence et-ou corruption d’agents publics étrangers et-ou complicité d’abus de biens sociaux ». Le procès qui s’ouvre devant la 11e chambre correctionnelle du tribunal de grande instance de Paris risque d’être une bataille éprouvante.

Tout commence par une perquisition fiscale au château de Trécy à Villeherviers le 6 juin 2000. C’est dans cette charmante bourgade du Loir-et-Cher que Jean Caillet coule des jours heureux. Personne ne le connaît. Il est le patron d’une discrète société suisse baptisée Telliac. Tracfin a repéré sur ses comptes d’étranges mouvements : de grands groupes s’en serviraient à l’occasion de la signature de marchés à l’étranger pour « véhiculer de manière discrète…/… d’importantes commissions », note le rapport d’enquête fiscale. Au milieu des Vivendi, Alcatel… et autres entreprises internationales, un nom apparaît : Total. Le géant pétrolier aurait utilisé les facilités offertes par Jean Caillet et sa société pour verser des commissions lors d’opérations d’achat de pétrole brut dans les pays de la CEI et en Irak.

[…] Le 28 juillet 2002, le procureur de la République de Paris décide d’ouvrir une information judiciaire contre X des chefs d’abus de biens sociaux, complicité et recel. C’est le début du dossier « Pétrole contre nourriture ». L’enquête va être longue, 3 juges d’instruction plongeront tour à tour dans les méandres du dossier, Philippe Courroye, puis, après son départ pour le parquet de Nanterre, Xavière Simeoni et enfin Serge Tournaire, qui clôturera l’instruction et décidera de renvoyer Total et 19 personnes devant le tribunal correctionnel après avoir mis en examen la société en tant que personne morale. Dix ans d’enquête, au cours desquels, au fur et à mesure que les juges d’instruction vont creuser et retourner le bourbier irakien, ils mettront au jour un univers interlope fait de sociétés écrans, de commissions, de taxes, l’ensemble sur fond de guerre, de chantage et d’embargo des Nations unies. Lire la suite.

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