Blanchiment, mafias, trading : « Le capitalisme est devenu criminogène »

Lundi 31 mars 2014

Le grand entretien 30/03/2014 à 10h04

Blanchiment, mafias, trading : « Le capitalisme est devenu criminogène »

Camille Polloni | Journaliste Rue89

Le commissaire divisionnaire Jean-François Gayraud arrive au jardin des Tuileries en costume cravate. Il travaille à deux pas, place Beauvau.

Cet ancien de la DST – il y a passé dix-sept ans, se spécialisant notamment dans l’intelligence économique – désormais en poste à l’Unité de coordination de la lutte antiterrorisme (Uclat), a toujours eu une double casquette : policier et docteur en droit, auteur d’ouvrages sur le crime qu’il aborde du point de vue géopolitique. Il revendique son adhésion à une discipline controversée sur le plan académique, la criminologie.

[…] Existe-t-il d’un côté un capitalisme sain, fait de « ceux qui gagnent honnêtement leurs vies », et de l’autre des banquiers ou des avocats qui présentent une apparence de respectabilité et servent en réalité d’instrument au crime organisé, parfois sans le savoir ?

L’argent issu des activités criminelles, que ce soit le crime organisé ou la fraude et l’évasion fiscale, représente aujourd’hui des masses telles qu’elles ne peuvent pas totalement et uniquement se blanchir à travers l’économie réelle « de brique et de mortier ». Ces sommes très volumineuse, souvent en cash, doivent passer par des institutions financières.

Certaines décident de laisser rentrer l’argent sale de manière très consciente et stratégique. A échéances régulières depuis les années 70, de très grandes institutions bancaires ont ouvert la porte du poulailler.

Bien sûr, la très grande majorité des banquiers ou des financiers se comportent honnêtement et font preuve de bonne foi. Depuis le début des années 2000, de plus en plus de normes empêchent le développement d’activités frauduleuses, l’immixtion de l’argent sale dans les circuits financiers. Ce sont toutes les techniques dites de « due diligence » et de « compliance ».

Cependant pour ces professionnels, en première ligne avant même l’Etat, la détection de l’argent sale est un processus de plus en plus complexe. Cet argent passe par les paradis fiscaux et bancaires, on le sait, mais surtout par l’instrument des trusts et fiducies, qui permettent d’anonymiser le capital. Quand l’argent arrive dans une institution financière, il devient extrêmement compliqué de savoir qui en est le détenteur réel. Lire la suite.

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