Deux ex-ministres seront jugés en 2003 pour « blanchiment »

Jeudi 24 mai 2007

Reuters 03 octobre 12:42:30

Deux ex-ministres seront jugés en 2003 pour « blanchiment »

PARIS (Reuters) - Pour la première fois, deux anciens ministres français vont être jugés en 2003 pour "blanchiment d’argent« , dans un procès où sera abordé le problème des »fonds spéciaux" en liquide dont bénéficiaient le gouvernement et l’Elysée jusqu’en 2001.

Le juge Bruno Pireyre a prononcé cette semaine le renvoi en correctionnelle de François Léotard, ex-président de l’UDF et ministre de la Défense de 1993 à 1995, et de son ancien directeur de cabinet à l’UDF, Renaud Donnedieu de Vabres.

Le premier s’est aujourd’hui retiré de la vie politique. Le second a été en mai-juin dernier l’éphémère ministre des Affaires européennes du premier gouvernement Raffarin pendant cinq semaines, avant de démissionner en raison de cette affaire. Il a été réélu député d’Indre-et-Loire.

Le tribunal correctionnel de Paris devrait juger l’affaire Léotard-Donnedieu vers l’été 2003.

Le dossier va permettre à la justice parisienne de constituer une jurisprudence sur les « fonds spéciaux ». Un jugement affirmant l’illégalité de l’usage de ces sommes à des fins de financement des partis aurait des conséquences sur d’autres instructions judiciaires en cours.

Jusqu’à la suppression de cette pratique par le gouvernement Jospin en 2001, les ministres, Matignon et l’Elysée disposaient chaque mois d’une enveloppe d’argent liquide retirée à la Banque de France, non déclarée, qu’ils utilisaient sans contrôle.

L’argent était en principe destiné au fonctionnement de l’Etat et à des compléments de rémunérations des ministres et de leurs collaborateurs mais des enveloppes pourraient avoir été utilisées à des fins privées ou pour le financement de campagnes électorales.

L’affaire impliquant les deux ex-ministres concerne des manœuvres financières menées en 1996 pour le financement occulte du Parti républicain, devenu ensuite Démocratie libérale, parti qui a été dissous le mois dernier pour fusionner avec le RPR dans l’UMP.

CINQ MILLIONS DE FRANCS EN LIQUIDE

Cinq millions de francs en liquide (762.000 euros) ont été remis en 1996 par le PR à une petite société italienne agissant comme banque, le Fondo sociale di Cooperazione Europea. Cet établissement avait ensuite reversé l’argent au PR sous forme de prêt, une opération assimilée à du blanchiment d’argent par la justice.

Renaud Donnedieu de Vabres et François Léotard ont reconnu les faits et expliqué que l’argent provenait des « fonds spéciaux » conservés après le passage de François Léotard à la Défense entre 1993 et 1995.

L’incrimination de « blanchiment », utilisé souvent pour le crime organisé, désigne l’opération, qui consiste à effacer l’origine délictuelle ou criminelle d’une somme d’argent et à la rendre faussement irréprochable.

Dans ce cas précis, le délit d’origine serait, selon l’accusation, une "infraction à la législation sur le financement des partis politiques".

Or, François Léotard et Renaud Donnedieu de Vabres estiment qu’il était légal de financer leur parti avec l’argent liquide de l’Etat.

En effet, cet usage n’avait jusqu’ici jamais fait l’objet d’aucune poursuite judiciaire. La question de la jurisprudence est importante car les fonds spéciaux sont apparus dans de nombreuses enquêtes politico-financières.

Ainsi, Jacques Chirac, menacé en 2001 par une enquête sur ses voyages payés en espèces pour 3,1 millions de francs (472.000 euros) entre 1992 et 1995, a expliqué que l’argent venait des fonds spéciaux perçus lors de son passage à Matignon entre 1986 et 1988.

Après la suppression des fonds spéciaux, le Parlement a voté l’été dernier une augmentation de 70% des traitements des ministres, censée compenser la suppression des enveloppes en argent liquide.

© REUTERS

Publié avec l’aimable autorisation de l’Agence Reuters.

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