Le procès de la caisse noire de l’UIMM rejugé en appel

Mardi 27 octobre 2015

Le procès de la caisse noire de l’UIMM rejugé en appel

Par AFP — 26 octobre 2015 à 09:57

Les syndicats ont-ils bénéficié de la caisse noire du patronat ? L’ex-patron Denis Gautier-Sauvagnac et trois cadres de l’UIMM, la puissante fédération de la métallurgie, sont rejugés en appel à partir de lundi pour le détournement de millions d’euros destinés, selon eux, à « fluidifier les relations sociales ».

En première instance, Denis Gautier-Sauvagnac avait créé la surprise à l’audience en désignant clairement les syndicats représentatifs comme les bénéficiaires de ces enveloppes d’argent liquide, mais sans en apporter la preuve.

En réplique, les responsables CGT, CFDT FO et CFTC l’avaient mis au défi de donner des noms, Laurent Berger (CFDT) s’interrogeant sur ce que cachait ce « syndicalisme bashing » consistant pour le patronat à désigner « à la vindicte populaire les syndicats ».

Retraits d’importantes sommes d’argent liquide, destruction des traces comptables, omerta sur les bénéficiaires… Au centre du procès, qui se tiendra jusqu’au 4 novembre, figure l’une des plus anciennes et influentes fédérations patronales françaises, l’Union des industries et métiers de la métallurgie (UIMM).

Regroupant les puissantes entreprises de l’automobile, du nucléaire, comme de la construction navale, aéronautique ou ferroviaire, elle est prépondérante dans les négociations sociales et l’élection du patron des patrons français.

Parmi les prévenus rejugés en appel figurent un de ses anciens patrons, Denis Gautier-Sauvagnac, condamné en première instance à trois ans de prison dont un ferme et 375.000 euros d’amende, et l’UIMM en tant que personne morale, condamnée à 150.000 euros d’amende.

Dans ses attendus, le tribunal avait estimé que M. Gautier-Sauvagnac avait eu « une participation centrale, en connaissance de cause et pendant des années », au fonctionnement d’un « système occulte de distribution d’importants fonds en espèces ».

Les trois autres cadres de l’époque appelés à comparaître sont Dominique de Calan, délégué général de l’UIMM condamné à un an avec sursis et 150.000 euros d’amende en première instance, Dominique Renaud, chef comptable condamnée à huit mois avec sursis, et Jacques Gagliardi, cadre condamné à six mois de prison avec sursis.

  • Magot de 600 millions d’euros -

L’enquête judiciaire, déclenchée en septembre 2007 par un signalement au parquet de Paris de Tracfin, la cellule anti-blanchiment de Bercy, avait révélé au public l’existence de la caisse Epim (Entraide professionnelle des industries et des métaux).

Créée par l’UIMM en 1972 en réaction aux grandes grèves de 1968, cette caisse était destinée à apporter « un appui moral et matériel » à ses adhérents subissant un conflit collectif du travail et ayant versé pour cela 2% du montant de leur masse salariale brut annuelle (0,4% depuis 2001). Fin 2006, le magot amassé avoisinait les 600 millions d’euros.

Si une partie de l’argent a bien servi le but fixé, comme lors d’un conflit social à PSA Aulnay en 2007, la justice reproche à l’ancien patron d’avoir abusé de la confiance des adhérents en utilisant, cette fois en toute opacité, une partie du pactole à des fins contraires aux buts de l’Epim et à la légalité.

Près de 18 millions d’euros ont été retirés en espèces et sans contrôle des autres responsables de la fédération par Denis Gautier-Sauvagnac, à partir de comptes spéciaux alimentés par l’Epim entre 2000 et 2007. Si une partie de cette somme a été retrouvée, il reste un solde de 15,6 millions sur lequel la justice a enquêté.

Le procès correctionnel a permis de confirmer qu’une partie a servi à des compléments de salaire, mais la destination de la plus grosse part n’a jamais été clairement identifiée.

Pour les juges du tribunal correctionnel, ces pratiques, contrairement à ce qu’a soutenu M. Gautier-Sauvagnac, « ne concourraient pas à une meilleure régulation de la vie sociale mais à alimenter des soupçons de financement occulte de partis politiques, d’achats de parlementaires, d’achat de la paix sociale, d’enrichissement personnel, à jeter le discrédit sur tous les décideurs de la vie politique et économique du pays, de telle sorte qu’elles sont extrêmement négatives pour l’intérêt général ».

AFP

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