Royaume-Uni : le système de santé prend l’eau

Samedi 6 janvier 2018

Royaume-Uni : le système de santé prend l’eau

Autrefois fierté des Britanniques, le National Health Service, sous-financé, n’est plus en mesure d’assurer correctement sa mission.

Par Yves Cornu Publié le 06/01/2018 à 14:47 | Le Point.fr

Ce fut un humiliant rétropédalage. Interpellée le 3 janvier sur la saturation des hôpitaux britanniques, notamment en raison d’une épidémie de grippe, Theresa May avait cru mettre un terme à la polémique naissante en assurant que le National Health Service (NHS, le système de santé national) était « mieux préparé pour l’hiver que jamais ». Le lendemain, en visite dans un établissement dont les urgences étaient totalement engorgées, la Première ministre a dû faire amende honorable : « Je sais que c’est difficile, je sais que c’est frustrant, je sais que c’est décevant pour les gens et je m’en excuse. »

Entre-temps, les journaux télévisés s’étaient chargés de rappeler à quoi ressemble un hôpital en ce début d’hiver : couloirs encombrés par les lits et les brancards, temps d’attente aux urgences pouvant excéder les douze heures, opérations ne présentant pas de caractère d’urgence reportées d’un mois, personnel dépassé.

Manque de personnel criant

Parallèlement, la parole s’est libérée, qu’il s’agisse des patients impatients ou du corps médical dénonçant sur les réseaux sociaux « une médecine de champs de bataille » ou « des conditions dignes du tiers monde ». Le Royaume-Uni n’a pas le monopole de ce genre de situation de crise. Mais cette réalité cadre mal avec la réputation du NHS, qui est considéré comme un joyau de la Couronne ; « une religion nationale » avait un jour déclaré un ministre. Créé après la Deuxième Guerre mondiale, il est égalitaire et généreux dans la mesure où les soins sont gratuits.

Voilà pour la théorie. Car cela fait longtemps que le service de santé n’a plus les moyens de ses ambitions. Et la tendance s’est accentuée depuis la crise de 2008, qui s’est traduite par plusieurs années de coupes claires dans les programmes sociaux. Au gré des restrictions budgétaires, le nombre des lits d’hôpital est tombé à moins de 150 000 (contre le double, il y a trente ans) et le manque de personnel est devenu criant. Déficit qui risque de s’accentuer, non pour raisons financières cette fois, mais un certain nombre de médecins et d’infirmières, venus d’autres États membres de l’UE, envisagent désormais de rentrer au pays en raison des incertitudes liées au Brexit.

Sept milliards d’euros injectés au cours de la législature

En novembre, le gouvernement s’est engagé à injecter 6,3 milliards de livres supplémentaires (plus de 7 milliards d’euros) au cours de cette législature, mais les effets de cet investissement exceptionnel ne se feront pas sentir avant plusieurs mois. Quant à ceux qui avaient cru que la sortie de l’Union européenne bénéficierait au NHS comme le leur avait promis Boris Johnson, grand « brexiter » devant l’Éternel, ils en sont pour leurs frais.

L’actuel ministre des Affaires étrangères avait fait campagne dans un bus rouge orné du chiffre « 350 millions de livres » ; ce que coûtait, selon lui, l’UE au budget britannique chaque semaine. Et il avait promis de consacrer les sommes ainsi économisées à la remise à niveau du NHS. Le chiffre était mensonger, délibérément, car il ne prenait pas en compte ce que Bruxelles reverse à Londres. Contrairement à Theresa May, Johnson, lui, ne s’est pas excusé.

Source de l’article.

Revenir en haut