Ce que dit l’arrestation de Carlos Ghosn sur la lutte contre l’évasion fiscale

Jeudi 22 novembre 2018

Ce que dit l’arrestation de Carlos Ghosn sur la lutte contre l’évasion fiscale

Interview 22 novembre 2018 Le point de vue de Sylvie Matelly

Le 19 novembre, Carlos Ghosn, le PDG de l’Alliance Renault-Nissan-Mitsubishi s’est fait arrêter à Tokyo. Il est soupçonné d’avoir dissimulé une partie de sa rémunération au fisc japonais, remettant le débat sur la fraude et l’évasion fiscales sur le devant de la scène, dans un contexte de montées des inégalités et des nationalismes. Le point de vue de Sylvie Matelly, directrice adjointe de l’IRIS.

Comment interpréter l’arrestation de Carlos Ghosn au Japon ? Une telle arrestation est-elle inédite ?

On constate une montée en puissance de la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales, l’arrestation de Carlos Ghosn en est un nouvel épisode. Les initiatives se sont en effet multipliées ces dernières années. C’est le cas aux États-Unis, où la loi FATCA impose à toutes les banques qui hébergent des avoirs de citoyens américains de déclarer leurs revenus au fisc américain. Il est à noter d’ailleurs que tous les citoyens de ce pays (ou tout détenteur d’une Green Card) doivent déclarer leurs revenus aux États-Unis et, en l’absence de convention avec le pays de résidence, y payer leurs impôts. C’est extrêmement efficace ! Par ailleurs, depuis quelques années, la lutte contre l’évasion fiscale se révèle très active aux États-Unis. Il semblerait qu’il en soit de même au Japon. L’Europe pourrait suivre cette tendance, mais les divisions intra-européennes ont bloqué et bloquent toujours bon nombre d’initiatives européennes et les progrès concrets sont essentiellement nationaux. En France, par exemple, dans le cadre de la loi Sapin 2, les rémunérations des PDG doivent être rendues publiques.

Cette arrestation est également singulière par son déroulé puisque c’est un lanceur d’alerte interne qui a prévenu l’entreprise et c’est Nissan, donc l’entreprise elle-même, qui a porté plainte, dénonçant ainsi son propre PDG auprès des autorités. Ce n’est pas la première fois qu’une entreprise le fait. C’est notamment le cas d’Airbus qui a récemment dénoncé des pratiques de corruption auprès des autorités britanniques. Les faits ne concernaient pas directement le top management de l’entreprise (au départ tout du moins), mais ont entrainé une réorganisation interne. Les entreprises se posent de plus en plus souvent en victimes lorsque de telles affaires sortent alors que fut un temps, elles payaient les meilleurs avocats pour se défendre et assumaient les amendes le cas échéant. Ces nouvelles pratiques peuvent réellement avoir un impact sur le management et elles traduisent certainement une prise de conscience des risques que font courir à l’entreprise, l’irresponsabilité de certains… Lire la suite.

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