Evasion fiscale : des schémas de plus en plus sophistiqués

Jeudi 21 février 2019

Evasion fiscale : des schémas de plus en plus sophistiqués

20/02/2019 | 14:55

Paris (awp/afp) - L’amende record de 3,7 milliards d’euros infligée au géant bancaire suisse UBS par la justice française condamne des méthodes de « démarchage » qui ne sont plus forcément d’actualité, les fraudeurs optant désormais pour des systèmes plus sophistiqués pour échapper au fisc.

Est-il encore possible de cacher de l’argent à l’étranger ?

En principe, il n’est plus possible d’ouvrir discrètement un compte à son nom à l’étranger depuis la mise en place progressive de l’échange automatique d’informations en 2017. Chaque pays doit désormais signaler l’existence d’un compte au nom d’un ressortissant étranger à son pays d’origine. Le secret bancaire, dont profitaient autrefois les fraudeurs, est révolu pour ce genre d’évasion fiscale.

Elaboré au sein de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) pendant une dizaine d’années, l’échange d’informations doit encore prendre de l’ampleur pour se généraliser entre tous les pays.

« En termes d’opacité, d’échange de renseignements, on a vraiment changé les choses », se félicite Pascal Saint-Amans, directeur du Centre de politique et d’administration fiscales de l’OCDE. « La fraude fiscale, qui était auparavant au cœur du réacteur, est désormais marginalisée », a-t-il ajouté.

La mallette est-elle toujours d’actualité ?

Non. L’image du fraudeur qui franchissait la frontière suisse de nuit avec une mallette pleine de liasses de billets appartient au passé. Cette évasion fiscale « à la papa », comme l’ont définie les élus communistes Alain et Eric Bocquet, auteurs du livre « Sans domicile fisc », appartient au passé. « Aujourd’hui aucune banque suisse n’accepte votre argent », assure M. Saint-Amans. Les fraudeurs doivent, selon lui, passer « du côté obscur », en se rendant coupables de délits.

« Si vous voulez cacher de l’argent aujourd’hui, ce n’est pas tellement des structures sophistiquées qu’il faut mettre en place, mais des structures criminelles », a commenté le responsable de l’OCDE.

L’évasion fiscale est-elle finie ?

Les scandales se sont succédé au cours des dernières années, révélés principalement par le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ), sur les pratiques de grands groupes et de personnalités qui cherchent à déposer leurs revenus là où ils seront moins taxés.

Les « LuxLeaks » en 2014, les « Panama Papers » en 2016 et plus récemment les « Paradise Papers » en novembre 2017 ont mis en cause des personnalités et des entreprises ayant échappé au fisc grâce à des montages financiers complexes.

Pour les frères Bocquet, les fraudeurs ont « toujours un temps d’avance ». « Ils vont faire attention aux nouvelles règles, mais ils vont ensuite inventer d’autres systèmes », ont-ils assuré.

Le problème ce ne sont plus seulement les particuliers, mais aussi les multinationales qui procèdent à +l’optimisation fiscale+, en clair qui réduisent leurs impôts grâce à des montages comptables sophistiqués, parfois parfaitement légaux.

De quels moyens disposent les Etats ?

A chaque scandale, les gouvernements et institutions montent au créneau, lançant une multitude de propositions pour empêcher ces pratiques. La meilleure solution est pourtant de parvenir à un accord à l’échelon mondial, comme l’a démontré l’OCDE avec l’échange automatique d’informations. Elle travaille actuellement sur une taxe sur les géants du numérique.

Pour lutter contre l’évasion fiscale, les institutions internationales comme l’OCDE ou l’Union européenne (UE), ainsi que les pays, disposent d’une arme pour mettre la pression, une liste noire qui met des pays à l’index et qui les contraint à faire des concessions. Les Etats se sont ainsi progressivement adaptés aux normes internationales, à l’exception de Trinidad et Tobago, pays caribéen qui est toujours pointé du doigt par l’OCDE.

La Commission européenne a proposé la semaine dernière d’ajouter sept pays à sa liste de pays tiers ne luttant pas assez contre le blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme, dont l’Arabie saoudite et le Panama. En plus des 16 qui figuraient déjà sur ce registre - comme l’Iran, l’Irak, le Pakistan ou encore l’Ethiopie et la Corée du Nord.

afp/rp

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