Financement libyen présumé : la justice britannique se prononce sur l’extradition de Djouhri

Mardi 26 février 2019

Financement libyen présumé : la justice britannique se prononce sur l’extradition de Djouhri

Par L’Obs Publié le 26 février 2019 à 04h30

Londres (AFP) - La justice britannique rend mardi sa décision sur la demande d’extradition de la France de l’homme d’affaires Alexandre Djouhri, protagoniste clé de l’enquête française sur le financement libyen présumé de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2007.

Convoqué à plusieurs reprises par la justice française, l’intermédiaire de 60 ans avait été arrêté en janvier 2018 à l’aéroport londonien d’Heathrow, en provenance de Genève, en vertu d’un mandat d’arrêt européen émis par la justice française, notamment pour « détournements de fonds publics » et « corruption ».

Son nom était apparu en particulier lors de la vente suspecte en 2009 d’une villa située à Mougins, sur la Côte d’Azur, à un fonds libyen géré par un dignitaire du régime de Kadhafi.

M. Djouhri, familier des réseaux de la droite et proche de l’ex-secrétaire général de l’Elysée Claude Guéant, est soupçonné d’avoir été, derrière plusieurs prête-noms, le véritable propriétaire de la villa et de l’avoir cédée à un prix surévalué, ce qui aurait pu permettre de dissimuler d’éventuels versements occultes.

  • « Pas un fugitif » -

« Je suis tout à fait confiant », avait affirmé Alexandre Djouhri au sortir du tribunal londonien de Westminster le 22 janvier, à l’issue de l’audience d’extradition, maintes fois reportée.

Face à la juge Vanessa Baraitser, il s’était dit « victime de deux magistrats » français, citant le juge d’instruction Serge Tournaire et le procureur du parquet national financier (PNF) Patrice Amar.

« En faisant croire à la justice anglaise, faussement, que j’étais un fugitif, le parquet national financier s’est fourvoyé et est dans l’incapacité de justifier son mandat d’arrêt », avait-il accusé un peu plus tôt.

Sa défense avait avancé que M. Djouhri avait été sollicité de manière informelle - par téléphone - par les enquêteurs, et qu’il avait lui-même proposé une rencontre à Genève, sans résultats. Ses avocats avaient affirmé que la loi helvétique - M. Djouhri est résident suisse - ne le contraignait pas à répondre à ces sollicitations ou à se rendre en France.

« Un mandat d’arrêt, c’est quand un type est en fuite et la fuite, il faut la constater. Or M. Djouhri n’était pas en fuite puisqu’il n’a jamais fait l’objet d’une convocation dans les règles », avait déclaré auprès de l’AFP l’un de ses avocats, Me Eric Dupond-Moretti.

  • « Contexte politique fort » -

Deuxième axe de défense, ses avocats avaient souligné le « contexte politique fort » de cette demande d’extradition, en rappelant l’affaire du financement libyen présumé de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2007.

Cette affaire vaut à l’ex-président français d’être mis en examen pour « corruption passive », « financement illégal de campagne électorale » et « recel de détournement de fonds publics libyens ». Il n’a pas le droit de se rendre en Libye ni de rencontrer neuf protagonistes, dont Alexandre Djouhri.

La défense de M. Djouhri l’avait donc présenté comme une cible « évidente » pour des enquêteurs cherchant à atteindre M. Sarkozy par procuration, tout en essayant de discréditer cette enquête.

Dernier argument, les avocats d’Alexandre Djouhri avaient également mis en avant sa santé fragile pour contester la demande d’extradition des autorités françaises.

Son cœur bat « anormalement vite », avait témoigné le docteur Alan Mitchell, mandaté par la défense, estimant que « le stress » était « un des facteurs responsables de ce rythme cardiaque trop rapide ».

L’homme d’affaire avait dû être soigné à deux reprises en prison, avec un défibrillateur, selon le docteur Mitchell. Il a aussi subi l’implantation d’un défibrillateur.

  • Caution d’un million de livres -

Suite à son arrestation en janvier 2018, Alexandre Djouhri avait été libéré une première fois après paiement d’une caution d’un million de livres (1,13 million d’euros).

Fin février 2018, il avait été remis en détention provisoire après l’émission d’un second mandat d’arrêt européen par la France. Puis en mars, la justice britannique avait décidé une nouvelle fois de le libérer sous caution en raison de problèmes cardiaques, avec une série de restrictions.

Jusqu’à la décision sur la demande d’extradition, Alexandre Djouhri doit rester chez lui entre 02h00 et 06h00 et se présenter à un poste de police entre 12h00 et 16h00. Il ne peut en outre quitter les arrondissements londoniens de Kensington et Chelsea, où il réside, et de Westminster.

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