Affaire Magnitski : des fonds détournés du fisc russe blanchis en Espagne

Samedi 13 avril 2019

Affaire Magnitski : des fonds détournés du fisc russe blanchis en Espagne (parquet)

Par Le Figaro avec AFP Publié le 12/04/2019 à 21:07

Une enquête a été ouverte en Espagne sur le blanchiment présumé dans ce pays de 35 millions d’euros issus, selon le parquet, du détournement en 2007 de milliards de roubles du fisc russe par un réseau corrompu dans « l’affaire Magnitski ». Un juge d’instruction a déclaré jeudi recevable la plainte présentée par le parquet anticorruption pour « un délit présumé de blanchiment de capitaux » en « bande organisée », selon un document judiciaire publié aujourd’hui.

L’affaire - qui a des volets dans d’autres pays dont la France, le Danemark et la Suède - est mondialement connue sous le nom du juriste russe Sergei Magnitski, mort en prison, et qui l’avait dénoncée. Conseiller du fonds d’investissement occidental Hermitage Capital, Magnitski avait été arrêté en Russie en 2008 après avoir dénoncé une machination financière de 5,4 milliards de roubles (130 millions d’euros) ourdie, selon lui, par des responsables de la police et du fisc au détriment de l’État russe et d’Hermitage Capital.

Il est décédé en prison en Russie en 2009, à l’âge de 37 ans, d’un malaise selon les services pénitentiaires russes. Une enquête du Conseil consultatif pour les droits de l’Homme auprès du Kremlin avait conclu de son côté, en 2011, qu’il avait été victime de coups et privé de soins. Cette affaire avait suscité de vives tensions diplomatiques entre Washington et Moscou et abouti, en 2012, à des sanctions américaines contre des responsables russes impliqués.

Dans sa plainte que l’AFP a pu consulter, le parquet anticorruption espagnol explique avoir été saisi en 2017 et 2018 par William Browder, patron du fonds Hermitage Capital. A son tour poursuivi par la Russie pour fraude fiscale, et devenu un virulent critique du Kremlin, ce Britannique d’origine américaine a été condamné par contumace en 2013 à neuf ans de prison. Dans son exposé des faits, le parquet explique qu’« Hermitage a été victime en 2007 en Russie d’une fraude (…) réalisée par une organisation criminelle dirigée par (Dimitri) Klyuev ».

Le parquet écrit que « Magnitiski avait découvert comment certains fonctionnaires de l’administration russe s’étaient appropriés » les fonds, ensuite « blanchis à travers une structure internationale de sociétés, banques et pays où la transparence (…) est limitée ou inexistante ». Le parquet anticorruption espagnol estime que 35 millions d’euros ont été transférés en Espagne, surtout en provenance de comptes domiciliés en Estonie. Le réseau de blanchiment aurait consacré cet argent à l’achat de biens immobiliers ou encore de pièces de rechange d’automobiles, de meubles, de chaussures ou d’étoffes.

Les bénéficiaires ont été « différentes sociétés et principalement des individus originaires de Russie et de l’ex-Union soviétique », précise-t-il, en demandant que des dizaines de personnes soient entendues en vue de leur mise en examen. Le 30 mai 2018, William Browder avait indiqué être en Espagne pour donner des informations au procureur anti-corruption. Mercredi, il a écrit sur son compte Twitter, en référence à la plainte du parquet espagnol : « c’est exactement ce que (le président russe Vladimir) Poutine essaie de m’empêcher de faire ».

Le Figaro avec AFP

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